jusqu’au 26 juillet

L’Été de toutes les performances aux Métallos

solos et apéro

L'Été de toutes les performances aux Métallos

« Une place achetée, un verre offert », la formule, contrairement à ce qui peut venir à l’esprit, ne relève pas de la promo de grande surface, mais d’une stratégie de l’écoute. Attablé devant un verre de sangria ou de jus de fruit, ne se sent-on pas un peu éloigné des tracas du boulot et de ce fait, plus détendu et plus disponible ? Raison pour laquelle la Maison des Métallos dont un des objectifs est d’organiser de la meilleure façon la rencontre entre les artistes et le public , a programmé trois seuls en scène à l’heure de l’apéritif qu’elle offre dans une ambiance conviviale au plus grand plaisir des spectateurs qui, on a pu le vérifier, apprécient d’être invités à regarder le théâtre autrement. Pour être festive, l’ambiance n’en est pas moins militante, aussi chacune des représentations est-elle précédée d’une intervention solidaire à l’action menée actuellement par les intermittents du spectacle.

A programme ( du 15 au 19 juillet), La Matte de et par la comédienne Flore Lefebvre des Noëttes, comédienne de haute sensibilité qu’on a pu voir dans les spectacles de Stéphane Braunschweig, Bernard Sobel, Jean-Pierre Vincent et tout récemment au TGP Saint Denis dans Phèdre mise en scène par Christophe Rauck. La Matte , c’est la mère avec un M majuscule, la sienne, « une mère courage tenue d’élever dix enfants » qu’elle a voulu faire revivre en empruntant tout à la fois au Marcel Proust de Combrey et à Daumier. Seule en scène, elle raconte, joue, revit son enfance de telle manière que l’histoire singulière touche à l’universel et au plus profond du cœur.

Pour sa part, le comédien Guillaume Bailliart , qui à Lyon, a joué sous la direction de Michel Raskine et Gwenaël Morin, propose avec Tartuffe d’après Tartuffe d’après Molière, une version décalée de la pièce de Molière dont il joue tous les rôles. Une aventure aussi folle qu’audacieuse à travers laquelle l’acteur explore la langue de Molière et en extrait tous les sucs en même temps que l’énergie de son jeu revivifie Tartuffe et nous le fait entendre différemment.

Chasser le naturel

Tout a commencé (du 8 au 15), sous le titre Un Grand singe à l’Académie , par « une conférence zoomorphe » adaptée par Jade Duviquet , de la nouvelle de Kafka Rapport pour une Académie , manière de Métamorphose  » inversée , puisqu’il ne s’agit pas d’un homme qui devient cloporte, mais d’un homme, artiste de music-hall convié à faire une conférence sur sa vie antérieure de singe , ce dont affirme-t-il il ne se souvient pas.

De toute évidence dans le dispositif qui englobe la scène et la salle et ainsi établit la proximité du narrateur avec son public, nous sommes les membres de cette Académie devant laquelle Pierre le Rouge raconte sa capture par des chasseurs et pourquoi et comment, enfermé dans une cage « trop basse pour qu’on s’y mette debout, trop étroite pour s’y asseoir », il décida que la seule issue pour lui n’était pas la liberté, « avec laquelle on trompe trop souvent les hommes » mais de devenir homme, « c’est si facile d’imiter les gens ». Pour autant, l’apprentissage pour devenir « un européen moyen » ne se fit pas sans répugnance ni batailles contre une nature simiesque qui, au fil de l’évocation du narrateur, affleure par instants brefs ou brusquement jaillit en mouvements telluriques. Alors, et accompagné de projections vidéos et d’un environnement sonore comme autant de réminiscences d’origine qui le hantent encore, sous le costume cravate du conférencier, c’est le chimpanzé de la Côte d’or de l’Afrique qui surgit.

Cyril Casmèze, comédien issu, notamment, du cirque Archaos, tout de souplesse et d’agilité, brouille magistralement les pistes entre le simiesque et l’humanité. Cocasse et bouleversant conférencier policé, brusquement emporté par des bouffées de rancœur et de colère par où s’échappe l’instinct, il donne magistralement corps à la question « peut-on échapper à ses origines ? », tout en nous renvoyant à nos propres violences et formatages.

En somme, une entrée en matière qui laisse bien augurer de cet été des performances. A la bonne vôtre !

L’été de toutes les performances jusqu’au 26 juillet. Maison des Métallos 19h
Tarifs de 5 à 10 euros tel 01 48 05 88 27

photo Eric Sargis

A propos de l'auteur
Dominique Darzacq
Dominique Darzacq

Journaliste, critique a collaboré notamment à France Inter, Connaissance des Arts, Le Monde, Révolution, TFI. En free lance a collaboré et collabore à divers revues et publications : notamment, Le Journal du Théâtre, Itinéraire, Théâtre Aujourd’hui....

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