Châtenay Malabry, théâtre La piscine, jusqu’au 13 novembre

Les Fourberies de Scapin d’après Molière

Scapin selon Omar Porras : réjouissant !

Les Fourberies de Scapin d'après Molière

Le metteur en scène Colombien Omar Porras a construit un univers très personnel qui exploite différents registres et où domine souvent un esprit baroque sud américain qui conjugue démesure et distance ironique. De l’exceptionnel Noces de sang de Lorca (1997) à ces Fourberies de Scapin d’après Molière, en passant par Ay Quixote d’après Cervantès (2001), La Visite de la vieille dame de Dürrenmat (2004) ou encore El Don Juan d’après Tirso de Molina (2005) ou Maître Puntila et son valet Matti de Brecht (2007), le jeu de l’acteur occupe une place privilégiée.

L’art des acteurs est dans les détails

A travers le travail du masque et de la gestuelle qui emprunte à la pantomime, les corps sont toujours éminemment signifiants, sans cesse en mouvement, même infimes, d’une expressivité faite de myriades de signes presque subliminaux sans que cette abondance paraisse jamais gratuite ni pesante. Il s’en dégage une vitalité tourbillonnante qui réclame des acteurs une certaine virtuosité. Chacun a défini une attitude symbolique nourrie d’une multitude d’indices et construit son jeu en fonction des fortes contraintes du masque, ou des postiches, et d’un costume totalement kitch. Se retrouver affubler d’oreilles en chou-fleur et d’un dentier énorme, d’un costume de clown à gros carreaux ou de collants rose bonbon influe fatalement sur le jeu. Omar Porras a su réinventer des types. La partition que les acteurs ont à jouer dans ces Fourberies est particulièrement complexe. Comme en musique, le bon tempo décide du relief des séquences. Parce qu’on est au royaume de la farce et de la commedia dell’arte, tout est surligné de gros traits de couleur et une part est faite à l’improvisation dont les acteurs usent avec talent, prenant joyeusement le public à partie mais sans aucune démagogie. Des scènes en ombres chinoises suggèrent ce qui n’est que raconté.

Une mise en scène enlevée

Omar Porras emboîte le pas de Molière avec fidélité jusque dans les libertés qu’il prend par rapport au texte faisant surgir ça et là quelques pans d’actualité. Le décor évoque l’Italie et les années 1950, rencontre improbable d’un bar jaune fluo et d’un jukebox clignotant avec l’ambiance pastel du décor discrètement italianisant. La comédie est conduite avec une belle alacrité par des acteurs, tous épatants, dont Lionel Lingelser qui interprète ce fieffé Scapin. Il mène la danse tout en finesse, jouant d’une riche palette de sentiments, toujours en connivence avec ses partenaires. En plus d’être un valet roué et intelligent qui se met au service de la jeunesse et de l’amour contre le conformisme étriqué des vieux parents, ce Scapin-là met de l’élégance, de la subtilité dans ces manières qui ont parfois quelque chose de félin, une sorte de noblesse naturelle qui l’élève au-dessus de ses maîtres. Lionel Lingelser fait merveille dans les fameux morceaux de bravoure comme la rossée de madame Géronte prisonnière d’un sac poubelle ou le numéro final destiné à se faire pardonner ses fourberies.

Les Fourberies de Scapin d’après Molière. Mise en scène : Omar Porras. Adaptation et dramaturgie : Marco Sabbatini et Omar Porras. Scénographie : Fredy Porras. Musique : Erick Bongcam et Omar Porras. Son : Emmanuel Nappey et Erick Bongcam. Création lumière : Mathias Roche. Création costumes : Coralie Sanvoisin assistée par Peggy Sturm. Couturière : Irène Schlatter. Masques et postiches : Cécile Kretschmar et Marie MessienJulie Biereye, Sophie Botte, Olivia Dalric, Peggy Dias, Karl Eberhard, Alexandre Ethève, Paul Jeanson, Lionel Lingelser, Richard Sandra. Théâtre Firmin Gémier/La piscine mardi, mercredi, vendredi et samedi à 20h 30, jeudi à 19h30. Durée : 1h50. Tel : 01 41 87 20 84.

Tout public, à partir de 9 ans.

17 au 19 novembre 2010 à Bourges / MC Bourges
25 et 26 novembre 2010 à Tarbes / Le Parvis, scène nationale
1er au 4 décembre 2010 à Sartrouville / Théâtre de Sartrouville – CDN

© Marc Vanappelghem

A propos de l'auteur
Corinne Denailles
Corinne Denailles

Professeur de lettres ; a travaille dans le secteur de l’édition pédagogique dans le cadre de l’Education nationale. A collaboré comme critique théâtrale à divers journaux (Politis, Passage, Journal du théâtre, Zurban) et revue (Du théâtre,...

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