Paris - Comédie-Française en alternance jusqu’au 19 juillet

La Grande Magie d’Eduardo de Filippo

Feu d’artifices

La Grande Magie d'Eduardo de Filippo

Situé dans une station balnéaire sur la mer Tyrrhénienne dans les années trente, l’Hôtel Métropole abrite sont lot de touristes livrés au farniente estival entre baignades et papotages. Au cours d’une soirée animée par Otto Marvuglia, magicien et pseudo professeur en sciences occultes, un client, Calogero Di Spelta - ignorant l’infidélité de sa femme -, voit celle-ci disparaître sans laisser de trace dans un sarcophage truqué. Un stratagème, qui avec la complicité du magicien et de ses comparses, permet à l’épouse volage de prendre la fuite avec son amant. Son absence durera quatre années, durant lesquelles le mari abandonné traverse sous l’influence de Marvuglia doutes et angoisses – focalisés autour d’une modeste boîte censée contenir l’absente -, perdant la notion de temporalité et refusant le réel pour glisser dans une forme de folie à même de justifier ses comportements. La réapparition de la belle après un ultime stratagème ne renforçant que son besoin d’illusion. Ecrite en 1948 par le comédien, auteur dramatique et metteur en scène napolitain, Eduardo de Filippo (1900 -1984), cette fable remarquablement construite s’inspire d’une observation critique de la société italienne de l’entre-deux-guerres, dans la grande tradition du théâtre populaire de la péninsule. A sa création, la pièce ne connut qu’un succès relatif avant que la mise en scène de Giorgio Strehler en 1984, au Piccolo Teatro de Milan puis à l’Odéon-Théâtre de l’Europe en 1987, lui confère une audience internationale justifiée tant elle porte en elle des composants du théâtre : l’illusion, le mensonge et la réalité. Après la mise en scène récente de Laurent Laffargue (voir article webthea du 18 janvier 2009), cette nouvelle version, orchestrée avec beaucoup de maîtrise et d’allant par le metteur en scène anglais Dan Jemmet, porte avec bonheur les accents de cette vision comique et cruelle du monde et des humains. Dans le climat instauré par le décor évolutif de Dick Bird, - qui dépasse la localisation illustrative dans son rapport au théâtre - la représentation trouve un bel équilibre dans son dosage “magique” et cerne avec acuité la diversité et la complexité des personnages. Elle le doit en grande partie à la brillante interprétation de l’ensemble des comédiens de la Comédie-Française. Autour d’un savoureux Hervé Pierre, illusionniste et manipulateur aux allures diaboliques, et de Denis Podalydès, Calogero émouvant dans ses troubles et ses égarements, tous sont au diapason de cette rencontre festive avec le théâtre.

La Grande Magie, d’Eduardo de Filippo, texte français Huguette Hatem, mise en scène Dan Jemmet, avec Claude Mathiey, Michel Favory, Isabelle Gardien, Cécile Brune, Alain Lenglet, Coraly Zahonero, Denis Podalydès, Jérome Pouly, Loïc Corbery, Hervé Pierre, Judith Chemla.
Scénographie Dick Bird, costumes Sylvie Martin–Hyszka, lumières Arnaud Jung. Comédie-Française en alternance jusqu’au 19 juillet 2009. Durée 1 h 50.

A propos de l'auteur
Jean Chollet
Jean Chollet

Jean Chollet, diplômé en études théâtrales, journaliste et critique dramatique, il a collaboré à de nombreuses publications françaises et étrangères. Directeur de publication de la revue Actualité de la Scénographie de 1983 à 2005, il est l’auteur de...

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