jusqu’au 20 février

JT16 le Festival du Jeune Théâtre

Un art déjà bien affûté

JT16 le Festival du Jeune Théâtre

Conçu dès son origine comme tremplin des jeunes comédiens qui sortaient du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique (CNSAD) et de l’école du Théâtre National de Strasbourg, le JTN ( Jeune Théâtre National) a été créé en 1971 à l’initiative de Pierre Dux alors administrateur de la Comédie-Française et Pierre-Aimé Touchard directeur du CNSAD. Depuis, l’évolution de la décentralisation et du théâtre public a remodelé le paysage et ouvert le champ des écoles d’acteurs, certaines accolées aux Centres dramatiques nationaux tels ceux de Bordeaux, Lille, Saint-Etienne. C’est ainsi que de deux, le nombre des écoles supérieures d’art dramatique est passé à douze aujourd’hui. Autant de viviers qui ont fait évoluer les missions du JTN, organisme subventionné par le Ministère de la culture. Parmi celles-ci, faciliter l’insertion des jeunes artistes issus de ces écoles-là dont certaines ne forment pas seulement au jeu mais aussi à d’autres disciplines, de la scénographie à la création des lumières en passant par la dramaturgie. Au fil de leur cursus se dégagent des affinités entre les élèves, se scellent des amitiés qui les incitent à se regrouper en compagnie ou en collectif pour créer leur propres spectacles.

Pour débordantes d’enthousiasme et d’ardeur qu’elles soient, ces jeunes équipes ont bien du mal à se faire entendre et à s’insérer dans un circuit professionnel pour le moins embouteillé. Donner un coup de projecteur sur le travail de neuf d’entre elles et leur permettent de se confronter au public, est la raison de ce festival piloté par Marc Sussy, directeur du JTN, et en toute complicité artistique avec le Théâtre de la Commune d’Aubervilliers, Le Nouveau théâtre de Montreuil, le Théâtre de la Cité Internationale qui accueillent les spectacles puisque le JTN outil de promotion et lieu de fabrique, paradoxalement, ne possède pas de lieu de spectacle.

Signe de leurs préoccupations plus que du hasard, la ligne générale des spectacles programmés est significative de l’appétit des jeunes créateurs à intégrer les images et les nouvelles technologies dans leur réalisation, comme de leur prédilection pour les écritures de plateau. En quête de leur propre vocabulaire lorsqu’ils s’emparent d’un texte ou du répertoire, ils en usent comme d’un matériau ou chambre d’écho de leurs visions du monde.
Ainsi fait Clara Chabalier qui, avec « Cassandre – Matériaux », mixe le poème Alexandra de l’antique grec Lycophron et les technologies actuelles pour mieux nous faire saisir que les questions posées depuis la nuit des temps autour de la guerre, du pouvoir, du désir, restent plus que jamais à l’ordre du jour (Théâtre de la Commune). Ainsi fait aussi, Linda Duskova qui revisite la pièce de Heiner Müller, Paysage sous surveillance , et invite les spectateurs à se promener dans ce qui pourrait être une galerie d’art et où des tableaux vivants seraient autant d’indices semés sur le chemin d’une énigmatique enquête ( Das ist die galerie à Montreuil).

Au théâtre de la Cité Internationale, avec Il était une fois un pauvre enfant , c’est la pièce de Büchner, Woyzeck que revisitent Jean-Baptiste Tur et le collectif Zavtra. Dans un huis clos intimiste, trois comédiens entremêlent les thèmes de Büchner et les situations nées d’improvisations « pour tenter de saisir le processus qui conduit un homme ordinaire à assassiner sa femme ».

Objet non identifiable, Théâtre est une proposition aussi inédite qu’audacieuse qui consiste pour le dire vite, à nous faire voir par les oreilles. Marcus Borja, metteur en scène et musicien qui « l’orchestre » y joint les deux bouts de sa passion et de sa formation, le théâtre et la musique à partir d’un instrument commun, la voix. Egalement chef de chœur, ses recherches artistiques portent sur « les poétiques artistiques de la voix et les espaces sonores ». Théâtre se présente comme une performance qui plonge 52 spectateurs dans l’obscurité et au centre d’une matière sonore déployée par 52 comédiens. En 34 langues différentes, ils font résonner toutes les variations et textures de la voix humaine : cris, rires, chants, chuchotements en une incroyable fresque polyphonique qui bouscule notre perception du temps et de l’espace.

C’est au total huit spectacles singuliers et un film qui, dans la variété de leurs formes et de leurs visées, attestent non seulement de la vitalité créatrice mais aussi de la maîtrise artistique des jeunes équipes programmées et qui méritent notre curiosité.

JT16 festival du Jeune Théâtre jusqu’au 20 février.

Au Théâtre de la Commune d’Aubervilliers : 13 -14 Cassandre-Matériaux (Clara Chabalier) 13 et 14 Pauline à la Plage d’après le scénario d’Eric Rohmer (Collectif Colette) tel 01 48 33 16 16

Théâtre de la Cité internationale 15 -16 Elle de Genet (Vincent Thépaut), 15 et 16 Pleine (Marion Pellissier), 15-16, Il était une fois un pauvre enfant (Collectif Zavtra) tel 01 43 13 50 50

Au Jeune Théâtre National 17-18 Théâtre (Marcus Borja) tel 01 48 04 86 40

Nouveau Théâtre de Montreuil 19-20 Das ist die galerie (Linda Duskova), 19- 20 La soucoupe et le perroquet. Tel 01 48 70 48 90

Jeunesse(s) film de Matthias Jacquin présenté le 13 au théâtre de la Commune et le 20 au Nouveau Théâtre de Montreuil

Photos" Pleine" © La Raffinerie, "Il était une fois pauvre enfant" © DR

A propos de l'auteur
Dominique Darzacq
Dominique Darzacq

Journaliste, critique a collaboré notamment à France Inter, Connaissance des Arts, Le Monde, Révolution, TFI. En free lance a collaboré et collabore à divers revues et publications : notamment, Le Journal du Théâtre, Itinéraire, Théâtre Aujourd’hui....

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