Le projet ‘Monteverdi 450’ de John Eliot Gardiner

Depuis 50 ans, le chef britannique réhabilite Monteverdi dans la conscience collective européenne.

 Le projet ‘Monteverdi 450' de John Eliot Gardiner

Pour célébrer le 450e anniversaire de la mort de Monteverdi, John Eliot Gardiner s’est lancé depuis avril sur les routes d’Europe avec la trilogie de ses opéras. Son périple s’arrête à Philharmonie de Paris du 16 au 18 septembre 2017.

En l’an 2000, le chef britannique avait effectué un pèlerinage mondial dédié à Bach au rythme d’une cantate par semaine et à chaque fois dans une église différente. Il vient de récidiver avec un autre géant européen avec le projet « Monteverdi 450 » consistant, d’avril à octobre 2017, à donner la trilogie de ses opéras aux quatre coins d’Europe. Paris est l’ultime étape européenne. Les Etats Unis suivront.

Derrière ce défi musical et artistique, il y a la dette que Gardiner a vis à vis de son professeur Nadia Boulanger qui lui a révélé Monteverdi, et la fidélité à un compositeur au cœur de son projet artistique depuis plus de 50 ans : retour aux sources des textes et aux couleurs de la musique ancienne loin de l’archéologie et du didactisme. Dès 1964 en effet l’étudiant de Cambridge d’alors rassemblait les meilleurs chanteurs du King’s College pour interpréter Les Vêpres de la Vierge Marie du compositeur italien. C’est l’acte fondateur de Monteverdi Choir qui devenu professionnel en 1967 – et associé au Monteverdi Orchestra en 1968 pour devenir en 1978 The English Baroque Soloists - n’a cessé depuis d’explorer près de 400 ans du patrimoine musical européen dont Monteverdi tient le rôle clé. Il est selon de Gardiner « le premier à avoir propulsé la musique dans notre monde ».

Pour bien saisir la portée de l’originalité esthétique et la spécificité sonore de l’univers monteverdien, et en restituer la palette d’émotions et d’imagination musicales, le chef revendique d’être à la fois un scientifique, un coordinateur et un musicien. Des trois opéras qui sont parvenus jusqu’à nous, voici ce que Gardiner en disait lors d’une interview au quotidien La Croix du 07 avril 2017 pour en souligner la théâtralité radicale et la modernité dramatique très shakespearienne : « Orfeo (1607), c’est la célébration du pouvoir de la musique qui symbolise celui de l’amour. L’amour qui est perte et retrouvailles, avant d’être transcendé en puissance spirituelle. Le Retour d’Ulysse dans sa patrie (1640) orchestre le combat, in fine victorieux, de la constance – incarnée par Pénélope – contre la méfiance et le découragement. Quant au Couronnement de Poppée (1642), c’est le spectacle de l’amour charnel et immoral mais que la musique illumine, en particulier dans un duo final d’une beauté céleste. Et dire que cette histoire d’adultère et de cruauté est née du génie d’un musicien devenu prêtre ! »

Assumer une interprétation et un dispositif musical toujours engagés.

Pour en assurer la cohérence esthétique, Gardiner a choisi des chanteurs qui seront « distribués » dans les trois opéras en évitant deux écueils : Celui du bel canto standardisé et anonyme de l’opéra du XIXe siècle et a celui d’un extrême dépouillement, d’une recherche maniaque de pureté qui tiendrait à distance les émotions, dans un parfait contresens. Gardiner ne cesse de marteler que Monteverdi fut un homme de théâtre pour qui la musique donne forme aux affects et à l’action portés par le texte.

Le projet « Monteverdi 450 » est donc bien le résultat passionné de décennies de recherches universitaires, d’hypothèses et de controverses, de tentatives et d’erreurs de jugement assumées pour rendre toute la noblesse et l’inventivité radicale de la musique de Monteverdi. Et le résultat est là loin des faux débats sur l’authenticité des partis prs : le génie de Monteverdi est désormais inscrit et associé à ses contemporains baroques européens peintres : Caravage, Rubens et écrivains : Tasse, Cervantès et Shakespeare … « Le plus beau présent que nous pourrions offrir à Monteverdi, insiste Gardiner serait, je pense, de replacer l’excitation, et peut-être aussi la peur, au cœur de son œuvre. »

• Monteverdi Projet 450 à la Philharmonie de Paris
Avec Monteverdi Choir, English Baroque Soloists, et Sir John Eliot Gardiner, direction, mise en espace, Elsa Rooke, mise en espace, Isabella Gardiner , costumes, Patricia Hofstede, costumes, (Atelier Paradis)

Samedi 16 septembre 19h30 : Orfeo
https://philharmoniedeparis.fr/fr/activite/opera/17768-orphee-monteverdi?date=1505583000

Dimanche 17septembre 19h30 : Le Retour d’Ulysse dans sa patrie https://philharmoniedeparis.fr/fr/activite/opera/17769-le-retour-dulysse-dans-sa-patrie-monteverdi?date=1505669400

Lundi 18 septembre 19h30 : Couronnement de Poppée https://philharmoniedeparis.fr/fr/activite/opera/17770-le-couronnement-de-poppee-monteverdi

A propos de l'auteur
Olivier Olgan
Olivier Olgan

Diplômé de Sciences Po et licence de Droit, parallèlement à une carrière de consultant en communication institutionnelle et culturelle, Olivier Le Guay - Olgan a contribué à la rubrique musicale et multimédia de La Tribune de 1991 à 2006, et effectué de...

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