Paris, Les déchargeurs jusqu’au 3 mars 2012
J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne de Jean-Luc Lagarce
Pavane autour d’un jeune homme
Jean-Luc Lagarce a souvent raconté le retour d’un jeune homme – son double – parmi les siens. Dans J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne, ce jeune homme ne parle pas. Il peut même ne pas être là et être juste évoqué par cinq femmes, une aïeule, la mère et les trois sœurs, qui interprètent ce retour à leur guise, télescopent à l’infini leurs sentiments et leurs souvenirs. Dans cette nouvelle mise en scène par Catherine Descastel, l’homme est présent, silencieux, dans un berceau qui est aussi un cercueil, à la fois naissant et mourant. Autour de lui tournent les femmes et ces paroles qui multiplient les vérités sans jamais atteindre la vérité.
La mise en scène de Catherine Descatel prend un parti rituel et symbolique. Les femmes, en robe noire, les pieds nus, portent un maquillage blanc qui s’apparente à un masque. Régulièrement, elles dansent selon une chorégraphie qui exprime une double relation d’amour et de cruauté. Il semble y avoir là une volonté de relier Lagarce à la grande tragédie, celles de la Grèce antique ou celle des modernes tragiques méditerranéens. Les comédiennes parviennent à jouer cette double partition, verbale et physique, en développant les individualités des personnages. On peut préférer un Lagarce plus ancré dans la quotidienneté, mais le spectacle de Catherine Descatel et de la compagnie Ubwigenge est d’une réelle beauté maîtrisée. C’est en même temps l’une des mises en scène les plus fidèles puisqu’elle ajoute le personnage de l’homme, invisible dans le texte et pourtant si dessiné en creux par Lagarce que celui-ci disait de sa pièce : « C’est une lente pavane des femmes autour du lit d’un jeune homme endormi. »
J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne de Jean-Luc Lagarce, mise en scène de Catherine Decastel, lumières de T. Sebastiâo Tadzio, avec Anaïs Pénélope Boissonnet, Aurélia Pénafiel, Clémence Laboureau, Emilie Coiteux, Florent Arnoult, Noémie Sanson. Les Déchargeurs, 19 h, tél. : 08 92 70 12 28, jusqu’u 3 mars. Texte aux Solitaires intempestifs. (Durée : 1 h 15).