Paris - Salle Pleyel jusqu’au 8 novembre

Evénement Sibelius par le Philharmonique de Los Angeles

L’intégrale de la musique symphonique de Sibélius

Evénement Sibelius par le Philharmonique de Los Angeles

Réduit en chantre de l’éternelle Finlande, Jean Sibelius s’impose pourtant comme le digne héritier de Beethoven et de Brahms, un lyrique au cœur puissant et un symphoniste de génie. Son compatriote Esa Pekka Salonen le réhabilite avec une intégrale de son œuvre symphonique à la Salle Pleyel du 4 au 8 novembre.

L’omniprésence de la nature finnoise

Avec Sibelius, on a le sentiment que si une seule goutte de sa musique vous effleure la peau, elle vous brûlera jusqu’à l’os. ” s’exclame Sir Simon Rattle contre les caricatures d’un compositeur trop souvent réduit en termes pittoresques ou mythologiques. Le finlandais Jean Sibelius (1865 – 1957) doit en effet son succès et beaucoup de malentendus – au sens propre et figuré - à l’omniprésence de la nature et de la légende finnoise qui irradient son œuvre. L’incompréhension manifestée longtemps à son égard tient aussi de sa distance vis à vis d’une époque avide de rupture et d’expérimentations.

Pourtant, “ le renouvellement de la musique apportée par Sibelius, insiste le musicologue Patrick Szernsnovicz, est au cœur de la problématique de la musique d’aujourd’hui. Son langage n’est certes pas moderne, en comparaison avec Stravinsky ou Schoenberg, mais sa pensée quant à la forme et le traitement du matériau était en avance d’un bon demi siècle sur son temps. ” En ce sens, l’auteur de ‘la Fille de Pohjola’ est en 1900 l’anti-thèse de Mahler, comme il sera avec ‘Tapiola’ (1926) l’anti-thèse de Stravinsky.

Renouveler l’écoute d’un compositeur solitaire et atypique

De Herbert von Karajan à Christoph von Dohnayi, Sibelius n’est plus la chasse gardée des chefs nordiques, même si c’est l’un des meilleurs chefs finlandais, Esa Pekka Salonen qui à la tête de l’Orchestre Philharmonique de Los Angeles vient renouveler notre écoute. Les grands chefs n’ont eu cesse de défendre la modernité de ce compositeur solitaire et atypique. En dernière date, il faut savourer l’intégrale du chef Neeme Jarvi avec l’orchestre symphonique de Gotebörg (Universal DG). Aucun scrupule donc à se plonger dans ces vastes partitions, véritables fleuves d’énergies aux multiples ressacs, éclats et tourbillons !

Si Sibélius a désormais sa place parmi les grands génies de ce siècle, cette reconnaissance n’a jamais été de soi – comme l’atteste son absence de nombreuses histoires musicales récentes ! Soucieux de travailler son propre langage musical, Sibelius a souffert de son trop grand respect du matériau symphonique qu’il reprenait de Brahms et de l’excès d’un certain nationalisme musical. Dés son entrée en 1892 avec ‘Kullervo’ à mi-chemin entre le poème à programme et la symphonie avec voix, il est devenu à son insu le porte drapeau des indépendantistes et le chef de l’école nationale finlandaise.

Une musique tellement hors de ce monde

Hormis quelques magnifiques poèmes symphoniques inspirés par les mythologies nordiques ‘En Saga’, ‘Luonnotar’ ou ‘La Suite de Lemminkaïnen’, son œuvre est avant tout une quête spirituelle, vers un dépouillement de la forme, vers plus de pureté aussi. “La musique de Sibelius est tellement hors de ce monde ” soupira un jour Karajan qui a beaucoup contribué à son rayonnement. Si ses deux premières symphonies montrent que Sibelius auraient pu suivre une voie identique à celle Malher ou de Richard Strauss, il a choisit sa propre logique intérieure, renouvelé de l’intérieur le canevas de la forme symphonique ; les formes s’allègent, l’architecture devient plus équilibrée, la texture plus transparente, dominée par une lumineuse sérénité.

Chaque symphonie transgresse à sa façon la loi du genre, précise Patrick Szersnovicz Dès la Troisième, à peu près contemporaine de "La Mer" de Debussy, le sens du mouvement, les nombreuses audaces et la pensée orchestrale annoncent Stravinsky, Bartok et Prokofiev. Sibelius exorcise les ambiguïtés et compromissions de son époque. Il synthétise le rythme wagnérien, dynamise celui de Beethoven, et, de son refus de solutions à court terme, fait naître un discours neuf dont le statisme de surface cache des puissants orages intérieurs. ”

L’exigence de Sibelius reste encore une énigme puisqu’elle lui fit garder le silence pendant trente ans, et détruire toute velléité de création après ‘Tapiola’ (1926). Cet ouvrage clé du XXéme siècle, furieux geyser symphonique constitue sa dernière grande oeuvre. Et condense les qualités les plus irréductibles de l’art du meilleur symphoniste de sa génération.

Sous la direction de Esa Pekka-Salonen, l’Orchestre Philharmonique de Los Angeles débute mercredi 22 - son intégrale de la musique symphonique de Sibelius : 4 concerts jusqu’au 8 novembre.
o Dimanche 4 (16h) La Fille de Pohjola, Symphonie n°3 et 1
o Lundi 5 (20h), Symphonie n° 6 & 5, Sept Chants (orchestration John Estacio), Symphonie n° 5
o Mardi 6 (20h), Le Retour de Lemminkainen Symphonie n° 2 - Esa-Pekka Salonen Wing on Wing
o Jeudi 8 (20h), Symphonie n° 4 & 7 Steven Stucky Radical Light (création)
Réservations :

http://www.sallepleyel.fr/francais/programme/detail_representation.asp?id_rep=15484

credit Mathiew Imaging

A propos de l'auteur
Olivier Olgan
Olivier Olgan

Diplômé de Sciences Po et licence de Droit, parallèlement à une carrière de consultant en communication institutionnelle et culturelle, Olivier Le Guay - Olgan a contribué à la rubrique musicale et multimédia de La Tribune de 1991 à 2006, et effectué de...

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