Du 2 au 8 octobre 2025 au ThéâtredelaCité - CDN Toulouse Occitanie.

Roméo et Juliette de William Shakespeare par Guillaume Séverac-Schmitz.

Le bruit et la fureur des amours mythiques contrariées.

Roméo et Juliette de William Shakespeare par Guillaume Séverac-Schmitz.

Roméo et Juliette de Shakespeare conte l’histoire d’amour empêchée entre deux jeunes gens issus de familles ennemies - Capulet, du côté de Juliette, et Montaigu, du côté de Roméo - : une haine familiale violente et inextinguible. Reste amère à jamais l’universalité déconcertante et pourtant emblématique de l’inaccomplissement sentimental - émouvante intrigue passionnelle, familière et scellée. Or, qu’à cela ne tienne, le théâtre lutte contre les destins trop ordonnancés.

En contre-poids de l’intrigue, Le Prince, autorité morale, interprété par Lydia Shelley - violoncelliste décisive sur le plateau -, rappelle aux deux clans ennemis qu’ils doivent mettre fin à leur haine ancestrale et aux malheurs d’une inimitié politique obsolète et désuète - une belle leçon d’humanisme.

Pour le metteur en scène plutôt fougueux, Guillaume Séverac-Schmitz dont on a pu voir les Richard II et Richard III, le mythique Roméo et Juliette met en majesté cette impatience souveraine de la jeunesse, à la fois sa propension à croire en ses rêves et son mouvement spontané de quête de soi et du monde qui, en reconnaissant l’autre, se reconnaît en même temps.

La pièce significative est souvent rattachée à une pop culture hollywoodienne datée ou à une image romantique révélatrice de l’impossibilité existentielle d’accomplir toute passion absolue. Un univers où la tradition et l’héritage parental régissent les jeunes gens. La mère de Juliette, bourgeoise comique et caricaturale - Sophie Cattani en alternance avec Olivia Corsini facétieuse -, s’obstine à vouloir régenter sa vie, précipitant sa mort. Une plaidoirie pour la liberté et l’écoute dans la famille : il est temps que les convenances, habitudes et idées reçues volent en éclats.

Aussi l’accent est-il mis ici sur un autre jeu révélateur de nos temps précipités, une autre posture immédiate - le dessin décisif des corps, l’incarnation des mouvements et gestes exacerbés à travers lesquels s’exprime et se débat la jeunesse - projets, enjeux et survie. Et puisque les personnages se livrent sans retenue à leur passion, à la surprise du désir et de l’amour, nous les verrons courir en boucle sur le plateau, exultant de joie et de rires, dynamiques et enthousiastes, se libérant d’une rage vindicative.

Fêtes, combats, duo d’amour, scènes de provocation verbale aux jeux de mots infinis - humour et allusions équivoques, interjections et exclamations, plaisanteries grivoises aux considérations implicites inavouées. Et les hommes se battent, chorégraphiant une danse tenace et ultime, taureaux front contre front : ainsi, Tybalt - Olivier Sangwa - et Mercutio - Gilles Morel.

Et la musique techno ou électro résonne à fond lors des teufs du moment, tel le bal initial chez les Capulet, interdit à Roméo : paillettes et lumières, plumes blanches et éblouissements, déhanchements et secousses, la vigueur affichée correspond à un élan tonique expansif et au bien-être de vivre.

Des praticables et escaliers blancs dignes des Folies Bergères, font monter et descendre une jeunesse en herbe qui joue entre l’horizontalité du monde quotidien et la verticalité d’un ciel perdu que remplace l’exigence humaniste.
Des moments festifs qui oeuvrent au contre-poids d’une existence morose.

Roméo se montre mélancolique et solitaire, amoureux éconduit de Rosaline au début, avant qu’il n’abandonne sa sincérité aux attraits de Juliette. Le héros est interprété par Marine Gramond - un Roméo crédible entièrement tourné vers son nouvel amour, et ne jouant pas les bellâtres convenus, les beaux jeunes gens qui s’ignorent, desquels on attendrait sens et profondeur.

Juliette - Clémence Coullon - chante à merveille, figure de musique baroque, oeuvrant à sa liberté, refusant des noeuds imposés. Frère Jean - Philippe Smith - aide les amants, conscient des risques mais croyant aux sentiments.

Théâtre, vidéo, musique en live, danse et jeu collectif, la fête se fait populaire, triviale et poétique, n’occultant pas les instants tragiques et lyriques de la mort des amants. Un hymne à l’amour et la liberté dans le bruit et la fureur.

Roméo et Juliette de William Shakespeare, nouvelle traduction et adaptation Clément Camar-Mercier, mise en scène et conception Guillaume Séverac-Schmitz (Eudaimonia), spectacle accompagné par Le ThéâtredelaCité, Avec Mathilde Auneveux, Olivia Corsini, Clémence Coullon, Marine Gramond, Guillaume Morel, Olivier Sangwa, Lydia Shelley violoncelliste, et Philippe Smith. Scénographie Emmanuel Clolus, chorégraphie Juliette Roudet, direction musicale Lydia Shelley, création lumière Michel Le Borgne, création et régie son Géraldine Belin. Du 2 au 8 octobre 2025, au ThéâtredelaCité 1 rue Pierre Baudis. 31009 Toulouse cedex. Tél : 05 34 45 05 05. Les 9 et 10 décembre 2025 au Théâtre Château Rouge à Annemasse. Les 12 et 13 janvier 2026 au Parvis - Scène Nationale de Tarbes. Les 16 et 17 janvier 2026 à L’Archipel - Scène Nationale de Perpignan. Le 20 janvier 2026 au Théâtre Molière de Sète - Scène Nationale Archipel de Thau. Les 22 et 23 janvier 2026 au Théâtre Cinéma - Scène nationale du Grand Narbonne. Du 27 au 29 janvier 2026 à La MAC - Maison des Arts de Créteil. Le 24 février 2026, au Théâtre - Scène Nationale d’Angoulême. Le 26 février 2026 à L’Odyssée - Scène Conventionnée de Périgueux. Du 28 au 30 avril 2026 au Théâtre de Caen. Les12 et 13 mai 2026 à L’Estive - Scène Nationale de Foix et de l’Ariège.
Crédit photo : Christophe Raynaud de Lage.

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Véronique Hotte

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