Jusqu’au 4 octobre aux Chapiteaux de La Villette
L’hymne à la soie de Miet Warlop
Dans sa nouvelle pièce graphique et dynamique « Inhale Delirium Exhale », la performeuse flamande met les danseurs aux prises avec des rouleaux de soie.

De grands rouleaux de tissu tombent des cintres avec fracas, rebondissent sur la scène et vont mourir aux pieds des spectateurs. Pendant toute la durée de l’hallucinant spectacle d’une heure qui s’ouvre aux Chapiteaux de La Villette, ce sont pas moins de cinq mille mètres de soie qui vont se déployer et déclencher une tempête sensorielle sans répit où la matière et les corps des six danseurs s’affrontent, s’entremêlent, s’annulent et repartent de plus belle.
Avec sa nouvelle création donnée dans le cadre du festival d’automne Inhale Delirium Exhale, la plasticienne, chorégraphe et performeuse Miet Warlop veut donner corps à une agitation mentale, une marée de sensations, d’images et de matières en mouvement. Entre les deux temps de la respiration, inspiration/expiration se déploie un delirium (du latin delirare : « sortir du sillon »), une panique qui prend une forme différente à chaque stance.
Sisyphes modernes
Depuis les années 2000, l’artiste flamande électrise la scène avec des spectacles à la frontière du concert rock, de la performance visuelle et du théâtre d’objets. En l’occurrence, il s’agit d’aborder « la turbulence de notre époque… une folie gigantesque qu’il faut pourtant apprendre à plier, à enrouler, pour parvenir à continuer à avancer », explique-t-elle dans le programme de salle. Sur les pulsations d’une musique électro entêtante, les six interprètes se débattent avec des évènements qui leur tombent dessus, tels des Sisyphes modernes.
Inspirée par la peinture baroque avec de grands drapés qui tombent du ciel et enroulent les corps, elle a choisi la soie, matière légère, souple et modulable qui épouse chaque geste avec un temps de retard. C’est le couturier Hermès qui a fourni les rouleaux de soie délaissés, lesquels n’en constituent pas moins de magnifiques exemplaires colorés. De leur manipulation par les danseurs surgissent de ci-delà des images/métaphores très réussies : comme cette pièce de soie blanche qui telle une vague géante s’abat sur le corps d’un danseur, se joue de lui avant de l’engloutir.
Même si les intentions de la chorégraphe ne sont pas toujours très claires (comme dans la séquence muette introductive) et si le maniement des tissus nécessite tout un appareillage surréaliste un rien lourdingue (machines à enrouler/dérouler, ventilateur géant...), la poésie visuelle, la dynamique et l’énergie déployées par le spectacle impressionnent.
Inhale Delirium Exhale, de Miet Warlop, jusqu’au 4 octobre, https://www.lavillette.com/
Concept, scénographie et direction : Miet Warlop. Musique : DEEWEE. Danseurs et danseuses : Milan Schudel, Emiel Vandenberghe, Margarida Ramalhete, Lara Chedraoui, Mattis Clément, Élias Demuynck. Scénographie : Miet Warlop en collaboration avec Mattis Clément. Costumes : Miet Warlop en collaboration avec Élias Demuynck. Créateurs textiles : Ginger Bogaert, Rowan Boeijen, Michelle Van Neste. Design lumière : Henri Emmanuel Doublier. Lumière : Seppe Van Rampelbergh. Son : Ditten Lerooij, Hector Devriendt, Niels Orens.
Coordination technique Marjolein Demey, Pepijn Mesure
Photo : Alexander Reinout



