Ervart ou les derniers jours de Frédéric Nietzsche

Pas si drôle

Ervart ou les derniers jours de Frédéric Nietzsche

On nous dit que Hervé Blutsch est un auteur dada facétieux, que sa pièce Ervart ou Les derniers jours de Frédéric Nietzsche est une comédie qui questionne le monde et le jeu théâtral, vaste ambition. Il se pourrait que le dadaïsme soit passé de mode et que ces pseudo-facéties absurdes ne nous fassent plus trop rire. Il se pourrait aussi que ce soit le texte lui-même qui déçoive. Partant de la situation de vaudeville classique du mari trompé, la pièce emprunte un dédale de chemins extravagants, des fantasmes paranoïaques du cocu qui devenu fou de jalousie met la ville à feu et à sang aux tentatives récurrentes d’une comédienne pour se faire embaucher en passant par un psychanalyste dangereusement "citationniste", un agent secret et précepteur zoophile amoureux d’un cheval ou une troupe de théâtre anglaise qui se trompe de pièce, de décor (soi-disant une évocation du terrorisme). Les irruptions de Nietzsche façon cinéma expressionniste allemand sont assez drôles ; dans la pénombre, à pas feutrés amplifiés, il se précipite sur une poubelle pour y jeter ses ouvrages subrepticement. Scènes malgré tout très secondaires comme l’est la présence du philosophe. L’anecdote du cheval qu’il aurait défendu contre le cocher qui le battait serait véridique mais sortie du contexte de la maladie de Nietzsche elle n’a pas grand sens dans l’économie du spectacle.
Beaucoup d’agitation ne fait pas une comédie pas plus que les déclarations d’intention malgré le talent des comédiens, en particulier Marie-Christine Orry qui, dans le rôle de la comédienne au chômage, distille un peu du peps qui manque au spectacle et Jean-Claude Bolle-Reddat, très drôle dans le rôle du majordome, dont le jeu décalé et désabusé, scrupuleusement compassé, donne une idée du ton facétieux qu’aurait pu avoir le spectacle.

Ervart ou les derniers jours de Frédéric Nietzsche de Hervé Blutsch, mise en scène Laurent Fréchuret, avec Stéphane Bernard, Jean-Claude Bolle-Reddat, James Borniche, Maxime Dambrin, Vincent Dedienne, Margaux Desailly, Pauline Huruguen, Tommy Luminet, Marie-Christine Orry. Au théâtre du Rond-point jusqu’au 10 février à 21h. Durée : 2h10. Résa : 01 44 95 98 21.

© Christophe Raynaud De Lage

A propos de l'auteur
Corinne Denailles
Corinne Denailles

Professeur de lettres ; a travaille dans le secteur de l’édition pédagogique dans le cadre de l’Education nationale. A collaboré comme critique théâtrale à divers journaux (Politis, Passage, Journal du théâtre, Zurban) et revue (Du théâtre,...

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