Don Pasquale de Gaetano Donizetti

Pur plaisir de la reprise d’une réussite

Don Pasquale de Gaetano Donizetti

Moins d’un an après sa création à Paris, Don Pasquale fait son retour dans la version piquante et ingénieuse de Michieletto. Michele Petrusi resigne pour le rôle-titre, avec adresse et humour et contribue à la réussite de cette reprise !

Don Pasquale nous convie sous son toit, une charpente de néons blancs surplombe une maison sans cloisons ni murs, dont ne subsiste que portes, voiture, décorations et objets un peu vieillots, l’univers d’un célibataire endurci. Don Pasquale, vieil homme acariâtre, accoutumé à ses routines, trouve son quotidien bouleversé par une étincelle sentimentale : Norina réveille chez lui un feu de jeunesse, un rebond d’entrain, de bien courte durée… Le septuagénaire est victime des manigances du Docteur Malatesta. Celui-ci lui promet la main de sa sœur, qui n’est en fait que l’amante d’Ernesto, le neveu de Don Pasquale.

Une fois le premier mariage prononcé, c’est un calque du décor initial qui le remplace, grâce à l’intervention des chœurs, en tenue de déménageurs pour l’occasion. Exit les vieux meubles et la décoration surannée, place au mobilier design et tape-à-l’œil, à la voiture de sport. C’est là l’entreprise de Norina qui compte profiter de la cassette de Don Pasquale pour mieux en vivre avec Ernesto plus tard. Caroline Alexander se sentait en juin dernier, entraînée dans « l’intimité d’une petite bourgeoisie ordinaire » (WT n°6180). Sur un grand écran en fond de scène sont projetées des images en direct, procédé vidéo dont Michieletto use avec justesse pour apporter dynamisme et surprise à l’ensemble. A la fin du troisième acte, alors que Don Pasquale est assis de force dans un fauteuil roulant et conduit à la maison de retraite, la morale un brin cruelle est chantée, répétée à l’envi : ce n’était pas un âge pour se marier…

Le Docteur Malatesta est donc l’architecte de l’intrigue. Jean, bottines, chemise ouverte, veste de cuir et lunettes de soleil, cet enjôleur se rit de Don Pasquale, fomente le rapprochement avec sa soi-disant sœur, pour mieux la destiner à Ernesto, son amant. Le baryton assume le rôle avec humour, la voix est claire et bien posée, la partition abordée avec aisance.

Javier Camarena campe un Ernesto enamouré, à la fois tendre et vaillant, tout en nuances et en puissance, à l’image de la scène du jardin et le « Com’è gentil ». La voix, assise sur des mediums sûrs, est bien projetée, les aigus sont perçants et sonores.

C’est Pretty Yende en Norina qui lui donne la réplique. Malicieuse et séductrice, cette Norina rend fou les trois hommes un par un, en témoigne son « So anch’ io la virtu magica » en fin de premier acte. La soprano sud-africaine montre de belles qualités techniques, un chant fluide et précis, des aigus clairs délicatement décomposés.

Comme en juin dernier, le septuagénaire bougon, aux habits désassortis, est chanté par Michele Petrusi qui restitue parfaitement, autant en chanteur qu’en acteur ce Don Pasquale baladé, moqué et finalement désabusé. La basse italienne est sonore et solide, sa posture est parfaitement à-propos. Michele Petrusi est drôle et fin, touchant aussi, on aimerait presque l’aider à découvrir le pot-aux-roses…

Si l’on apprécie autant la musique ce soir, c’est aussi grâce à la baguette nette de Michele Mariotti. Son sens de la phrase, sa grande précision et son souci de l’équilibre mettent l’Orchestre national de l’Opéra de Paris dans les meilleures dispositions pour offrir un son ample et brillant. Les chœurs apportent une belle épaisseur et une énergie nécessaire à ce classique du bel canto.

Ce Don Pasquale combine humour, talent, rythme et intelligence. La mise en scène est astucieuse, la musique est belle, servie par la prestation de grande qualité des chanteurs, des chœurs et de l’orchestre. On en redemande !

Orchestre de l’Opéra National de Paris, direction Michele Mariotti, choeur de l’Opéra National de Paris, direction Alessandro Di Stefano, mise en scène, Damiano Michieletto décors, Paolo Fantin, costumes, Agostino Cavalca, lumières Alessandro Carletti, vidéo, rocafilm (Roland Horvath, Carmen Zimmermann)
Avec :Don Pasquale : Michele PetrusiDottor Malatesta : Christian Senn Ernesto : Javier Camarena Norina : Pretty Yend Un notario : Frédéric Guieu

Opéra Bastille, 22, 25, 28, et 30 mars 2019 à 19h30, les 2, 6, 10, 13 et 16 avril 2019 à 19h30.
Réservations : www.operadeparis.fr, 01 41 60 72 72

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Quentin Laurens

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