Discussion avec DS de et par Raphaëlle Rousseau

Dans sa première pièce en solo, Raphaëlle Rousseau vénère et déconstruit l’image de la sublime Delphine Seyrig.

Discussion avec DS de et par Raphaëlle Rousseau

DS cela se prononce déesse, mais ce sont aussi les initiales de Delphine Seyrig. Une actrice devenue culte, dont l’image s’efface peu à peu, trop tôt disparue en 1990, soit deux ans avant la naissance de Raphaëlle Rousseau. Pour sa première pièce en solo, celle-ci fait revivre et s’incarne dans la grande actrice de théâtre et de cinéma révélée dans les années soixante par Alain Resnais (L’Année dernière à Marienbad) et sublimée par Luis Buñuel, Marguerite Duras, Chantal Akerman...

Plutôt que de pièce, Raphaëlle Rousseau préfère parler, au prologue, dans une adresse écrite au public, de « tentative » de spectacle, une « discussion rêvée » pleine d’humour entre une actrice en devenir et une actrice accomplie. En un peu plus d’une heure, la comédienne-autrice-metteuse en scène déroule trois parties assez habilement fondues l’une dans l’autre. Aux prises avec pôle emploi section intermittents du spectacle, elle vénère et déconstruit l’image de son actrice-phare, vamp éthérée et militante féministe, grande dame de la scène et des écrans et madame tout-le-monde au quotidien.

Le plateau du Théâtre de la Bastille est transformé en « autel mexicain » où se pratique le culte de la divinité avec quantité de bougies et de photos de l’actrice dans ses différents rôles. Par une sorte de séance de spiritisme, se met en place une vraie/fausse discussion entre les deux actrices. L’une bien vivante en chair et en os, l’autre par le truchement d’une voix, tirée d’un astucieux montage d’archives enregistrées, qui semble tomber tour à tour des quatre coins des cintres. Seulement une voix mais quelle voix, incomparable, sensuelle, immédiatement identifiable. Pressée de questions, Delphine Seyrig évoque ses doutes, ses interrogations, ses vulnérabilités tant dans sa vie privée que dans l’exercice de son métier.

Puis, par un basculement assez cocasse, s’opère une inversion de rôles. A l’aide d’une perruque blonde et d’une robe fourreau en lamé noir, Raphaëlle s’est mise dans la peau de Delphine. Inversement, Raphaëlle n’est plus qu’une voix. Et Raphaëlle/Delphine de s’expliquer sur le métier d’actrice, sur la difficulté d’être assimilée à une image, ce qui condamne au même type de rôle mais aussi assure du travail.

La déesse est descendue de son piédestal et comme, elle le dit dans le fameux monologue de Baisers volés, de François Truffaut, « Je ne suis pas une apparition, je suis une femme, ce qui est tout le contraire ». Un monologue magnifiquement interprété par Raphaëlle Rousseau qui conclut par là son spectacle, offrant ainsi une image flatteuse de son propre talent.

Discussion avec DS, de et avec Raphaëlle Rousseau, Théâtre de la Bastille jusqu’au 7 octobre, www.teatre-bastille.com
Écriture, mise en scène et jeu : Raphaëlle Rousseau. Collaboration artistique : Amélie Gratias. Création lumières : Benjamin Bouin.
Tournée :
Du 8 au 10 novembre : l’Anthea – Antipolis Antibes.
du 15 au 18 novembre : Festival du Théâtre National de Bretagne, Rennes.
du 19 au 21 mars : CDN de Besançon.
Photo India Lange

A propos de l'auteur
Noël Tinazzi
Noël Tinazzi

Après des études classiques de lettres (hypokhâgne et khâgne, licence) en ma bonne ville natale de Nancy, j’ai bifurqué vers le journalisme. Non sans avoir pris goût au spectacle vivant au Festival du théâtre universitaire, aux grandes heures de sa...

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