Paris-Théâtre de Paris

Douze Hommes en colère de Reginald Rose

Belle ouvrage

Douze Hommes en colère de Reginald Rose

Le film de Sidney Lumet, avec Henry Fonda, a rendu célèbre en 1957 ce titre de Douze Hommes en colère. Mais c’est une pièce qui est à l’origine du triomphe de ce film et du débat qu’il provoqua. Car le drame de Reginald Rose est un plaidoyer pour une meilleure justice et une mise en lumière de la fragilité des certitudes et des points de vue de chacun. Alors qu’on ne compte plus les pièces et les films qui se passent dans un tribunal, Rose au eu l’idée de représenter un jury d’assises, ce deuxième moment où va se constituer le jugement définitif. Aux Etats-Unis, pas d’homme de loi pour guider le débat des jurés qui ont été choisis dans la population. Les douze hommes sont livrés à eux-mêmes. Le cas à juger est celui d’un jeune homme accusé d’avoir tué son père. Tous les témoignages sont contre lui. Une voisine l’a vu frapper la victime à travers les vitres du métro. Un voisin l’a aperçu au moment où il s’enfuyait. A la première minute, onze des douze jurés sont persuadés que l’adolescent est coupable. A la dernière minute, ils seront douze à voter non coupable parce que celui qui ne croyait pas à la culpabilité du prévenu aura discuté les preuves et les témoignages et obligé ses compagnons de jury à mettre en cause leurs points de vue plus instinctifs que raisonnés.
Bien qu’habilement réadaptée, la pièce a un peu vieilli. Elle fonctionne sur la reconstitution de l’instruction par les jurés avec un savoir méthodique auquel on a du mal à croire : les jurés rejoignent-ils parfois l’analyse savante des policiers et des avocats pendant ce moment où la parole est plutôt à la réflexion et à l’émotion des personnes non spécialisées ? N’empêche que la pièce est menée avec une foudroyante efficacité, fondée sur une juste connaissance des mécanismes humains. Stephan Meldegg a repris la mise en scène qu’il avait faite il y a douze ans, en s’appuyant sur une distribution largement modifiée. C’est toujours Michel Leeb qui joue le rôle central, celui du juré qui prend à rebrousse-poil les convictions de ceux qui l’entourent : il est parfait de sobriété. Parmi les nouvelles têtes, il y a Pierre Santini, qui interprète avec crânerie un personnage antipathique (ce qui est rare chez les acteurs français, qui, en général, n’aiment pas ça !). Jean-Jacques Moreau est épatant en grossier Américian moyen. André Thorrent est très émouvant. Jean-Luc Porraz, qui renonce là à ses rôles comiques habituels, participe à cette diversité pittoresque que la mise en scène de Medegg cultive avec bonheur en compagnie de cette équipe irréprochable. Voilà de la belle ouvrage au service d’une idée généreuse ! Donc un double bienfait.

Douze Hommes en colère de Reginald Rose, adaptation de Attica Guedj et Stephan Meldegg, mise en scène de Stephan Meldegg. Avec Michel Leeb, Pierre Santini, Alain Doutey, Jean-Jacques Moreau, Jean-Luc Porraz, Erik Thomas, François Gamard, André Thorent, Jérôme Le Paulmier, César Méric, Louis-Marie Audubert, Eric Vieillard, Didier Nivert. Théâtre de Paris, tél. : 01 48 74 25 37 (1h 50). Texte à L’Avant-Scène Théâtre.

© Jean-Paul Lozouet

A propos de l'auteur
Gilles Costaz
Gilles Costaz

Journaliste et auteur de théâtre, longtemps président du Syndicat de la critique, il a collaboré à de nombreux journaux, des « Echos » à « Paris-Match ». Il participe à l’émission de Jérôme Garcin « Le Masque et la Plume » sur France-Inter depuis un quart...

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