Trust, karaoké panoramique d’après Falk Richer
Le billet vert passe au rouge
Prenez un texte de Falk Richer, secouez-le comme un alcool fort, attendez que l’actualité vienne se refléter dans le liquide – c’est immédiat - et projetez-y tous les ingrédients de colère dont vous disposez. Cela a beaucoup de chance de marcher, surtout si vous êtes une équipe de théâtre vive qui sait ajouter des vidéos et des chansons à son jeu endiablé. Avec l’équipe de la Phenomena la réaction chimique et explosive part au quart de tour. Falk Richer nous parle du pouvoir économique et de notre capacité (ou incapacité) de résister. La Phenomena ajoute des extraits des journaux d’hier et d’aujourd’hui (la une du Monde sur le rachat de la Fox par Disney, le soir où nous y étions) et des morceaux de journaux télévisés, avec Marcon ou Trump. Chacun des acteurs vient chanter, se parer des habits les moins bourgeois et les moins convenus et exprimer à la fois sa solitude et sa solidarité. On jette des billets de banque ou on les compte, mais ce sont des billets rouges : le billet vert a changé de couleur et de sens.
C’est une génération, une vague rageuse et joueuse qui s’expriment. C’est encore jeune, mais tant mieux, en accord avec cette volonté du Théatre de la cité et de son directeur Marc Le Glatin de donner la parole à la jeune création dans un cycle appelé Cluster. Cette fête des fous follement libre a une santé qui emporte, et plein de choses à dire. Maëlle Decquiedt mène son bal avec des interprètes qui savent être à la fois brouillons et rigoureux, débridés et millimétrés. A côté, Vincent Macaigne paraît poussif et démodé.
Trust, karaoké panoramique d’après Trust de Falk Richter, traduction d’Anne Monfort, mise en scène de Maëlle Dequiedt, dramaturgie de Simon Hatab, scénographie de Heidi Folliet, costumes de Solène Fourt , lumières et vidéo d’Auréliane Pazzaglia, son de Jori Desq, avec Youssouf Abi-Ayad, Quentin Barbosa, Romain Darrieu
(en alternance avec Romain Pageard), Pauline Haudepin, Mathilde Mennetrier, Maud Pougeoise.
Théâtre de la Cité internationale, tél. : 01 43 13 50 50, jusqu’au 22 décembre. (Durée : 1 h 25).
Photo Jean-Louis Fernandez.