Critique – Opéra-Classique

LA BOHEME de Giacomo Puccini

La patine lui va si bien…

LA BOHEME de Giacomo Puccini

Cette mise en scène signée Jonathan Miller en 1995 s’avère décidément un cru rentable. D’année en année, de reprise en reprise, (111 représentations comptabilisées au 4 décembre 2014), elle continue d’attirer un public compact et toujours ravi de son imagerie ciné des années trente, sa mansarde aux murs délabrés que masque une affiche de Jean Harlow, son café Momus où se bouscule une faune de marchands, de forains et de coquettes. Dubo, Dubon, Dubonnet, la pub au-dessus d’une pissotière à l’ancienne, ont la saveur de ces années d’entre deux guerres et de fausse insouciance. Les flocons de neige ont délavé les façades. La patine lui va si bien.

La valse des distributions se poursuit avec une belle homogénéité. Il y a quelques mois on voyait et entendait entre autres Angela Gheorghiu, Stefano Secco, Ludovic Tézier … (voir WT 4053du 18 mars 2014). La nouvelle Mimi est portoricaine, Ana Maria Martinez a le cheveu noir, le regard de la même eau et la silhouette fine. Comme la voix légère, un rien acide, pas exceptionnelle mais solide, et le jeu plutôt lointain ne laissant pas trop percer les grands émois. Les ténors prévus pour Rodolfo ayant déclarés forfait en dernière minute, c’est le jeune marocain Abdellah Lasri qui fut appelé à la rescousse. Un beau cadeau, une belle découverte : du charme et de l’allant, une vraie fraîcheur et un timbre clair, capable de faire grimper haut et sans effort apparent des aigus chatoyants. Coquine Musetta de Mariangela Sicilia au timbre clair, Marcello décontracté du baryton Tassis Christoyannis, sombre Colline d’Ante Jerkunica, Schaunard fraternel de Simone del Savio : les copains de la vie de bohème forment un quatuor bien assorti.

Sir Mark Elder dans la fosse semble vouloir éviter de faire couler trop dru le sirop tire-larmes puccinien. Sa direction claire et précise enchaîne les atmosphères, les drames et les couleurs sans tomber dans le pathos. Cette retenue, cette absence de trémolos, semble d’ailleurs la marque de fabrique et le cachet de cette reprise où domine la légèreté. Jusqu’à la scène ultime, la mort de Mimi, qui, comme il se doit propulse son concentré de grands sentiments.

La Bohème de Giacomo Puccini, livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica d’après le roman d’Henri Murger « Scènes de la vie Bohème », orchestre, chœur et chœur d’enfant de l’Opéra National de Paris, direction Sir mark Elder, chef de chœurs José-Luis Basso, mise en scène Jonathan Miller, décors Dante Ferreti, costumes Gabriella Pescucci, lumières Guido Levi. Avec Ana Maria Martinez (et Nicole Cabell), Mariangela Sicilia , Abdellah Lasri (et Khachatur Badalyan, Dimitri Pittas), Tassis Christoyannis, Simone Del Savio, Ante Jerkunica, Bruno Lazzaretti, Francis Dudziak.

Opéra Bastille, les 2, 4, 6, 9, 11, 13, 15, 18, 23, 26 et 30 décembre à 19h30, les 30 novembre, 21 et 28 décembre à 14h30.

08 92 89 90 90 - +33 1 72 29 35 35 – www.operadeparis.fr

Photos : Julien Benhamou – Opéra National de Paris

A propos de l'auteur
Caroline Alexander
Caroline Alexander

Née dans des années de tourmente, réussit à échapper au pire, et, sur cette lancée continua à avancer en se faufilant entre les gouttes des orages. Par prudence sa famille la destinait à une carrière dans la confection pour dames. Par cabotinage, elle...

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