Ravel et Debussy par l’Orchestre philharmonique de Radio France le 9 octobre
Avec un peu d’Espagne autour
Attachant parcours de musiques françaises d’inspirations espagnoles.
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- 11 octobre
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L’OPÉRA L’HEURE ESPAGNOLE DE RAVEL à l’auditorium de Radio France est introduit par des pages de circonstance : Pavane pour une infante défunte du même Ravel et Ibéria de Debussy. Ou la touche hispanisante des musiques françaises. Kazuki Yamada (remplaçant le chef espagnol Pablo Heras-Casado, initialement prévu) est à l’œuvre face à l’Orchestre philharmonique de Radio France. Ce chef qui avait évoqué son « sentiment japonais » se donne valeureusement dans ce répertoire qui semble parfaitement lui convenir (alors même qu’il a aussi prévu des musiques hispanisantes pour le concert du Nouvel An de l’Orchestre national de France). La Pavane s’épanche en délicatesses et effectif restreint (comme il se doit), menée sans baguette dans des gestiques assorties. Ibéria prend la suite, bien transmise, en grand ensemble dans la texture changeante et variée qui la caractérise.
Opéra de concert
Après l’entracte vient alors L’Heure espagnole, la grande œuvre de la soirée. Intitulée « comédie musicale », en un seul acte sur un livret pétillant de Franc-Nohain, L’Heure espagnole évoque un jeu d’horloges déménagées au gré des amours de l’héroïne Concepción, « avec un peu d’Espagne autour » (selon les mots du livret) dans une Tolède de convention. Ici à l’auditorium de la Maison de la radio, point de mise en scène ni de mise en espace, mais les surtitres des mots du livret rappellent l’esprit léger de la pièce. Une version de simple opéra de concert donc. Pour les cinq rôles de l’histoire, cinq chanteurs sont réunis au devant de l’orchestre avec quelques rares gestes de circonstance. La mezzo Isabelle Druet porte sa voix avec aisance pour une Concepción bien affirmée. Ses partenaires masculins, le ténor Matteo Macchioni (l’horloger Torquemada), le ténor Valentin Thill (l’amant Gonzalve), le baryton Rodion Pogossov (le muletier Ramiro) et la basse Piotr Micinski (le soupirant Don Íñigo Gómez), lui donnent bonne réplique. Une vocalité d’ensemble bien portée. Sauf que, devant un orchestre déployé en grand effectif (le Philhar au complet ! une centaine d’instrumentistes), le chant des solistes a souvent du mal à passer la rampe, victime d’une balance acoustique qui le dessert.
Il faut savoir que l’œuvre a été créée (en 1911) et conçue pour l’Opéra-Comique, avec un petit orchestre confiné dans la fosse laissant les chanteurs lancer sur le plateau leurs voix sans dommages. Il est donc regrettable que l’on ne s’en soit pas tenu à un orchestre de taille plus réduite, même à défaut de fosse d’orchestre. Car si Kazuki Yamada dirige en conformité avec les belles couleurs instrumentales de la partition, il laisse fréquemment l’orchestre s’épanouir au détriment des voix. Celles-ci bien souvent couvertes par l’orchestre. C’est ainsi. Alors que musicalement la restitution est sans défaut pour un programme attachant.
Illustration : Isabelle Druet répétant L’Heure espagnole. Photo Christophe Abramowitz/Radio France
Ravel : Pavane pour une infante défunte – Debussy : Ibéria – Ravel : L’Heure espagnole. Avec Isabelle Druet (mezzo), Matteo Macchioni (ténor), Valentin Thill (ténor), Rodion Pogossov (baryton) et Piotr Micinski (basse). Orchestre philharmonique de Radio France, dir. Kazuki Yamada. Maison de la radio et de la musique, Paris, 9 octobre 2025.



