Samouraï d’après Fabrice Caro

La piscine, sans Alain ni Romy

Samouraï d'après Fabrice Caro

C’est autour d’une piscine que se déroule l’adaptation du roman « Samouraï  » de Caro et elle n’a rien à voir avec celle qui avait réuni Delon et Schneider au cinéma. Celle-ci, omniprésente dans le décor au point de devenir une sorte de personnage, est celle des voisins qu’un romancier en mal d’inspiration doit surveiller durant les vacances de leurs propriétaires.

Amputé de son ami ayant mis fin à ses jours, oublié de toute actualité littéraire, plaqué par son amoureuse, harcelé par un entourage mondain obnubilé à lui trouver une nouvelle partenaire, Alan fait le pari de reconquérir lui-même son ex en écrivant un roman sérieux au sujet de ses aïeux, espagnols immigrés en France sous la dictature de Franco. Telle est la trame de cette histoire agencée en une structure de ritournelle.

En effet, des éléments reviennent systématiquement à intervalles plus ou moins réguliers. Le couple amical flanqué de ses jumeaux s’improvisant entremetteurs de partenaire sexuelle, son interview fantasmée avec une journaliste vedette de la télé, la mère du copain suicidé avec ses photos souvenirs, les punaises d’eau obsessionnelles en phase de prolifération, le résumé succinct de chacun des bouquins commencés avant d’être abandonnés tant ils sont farcis de poncifs…

C’est pathétique et hilarant. Se mêlent sentiments et émotions vécus avec : satire de la dépression, caricature d’une littérature faussement populaire, conflits internes d’une famille dépassée par le comportement de sa progéniture, ridicules des mondanités, vanité des notoriétés dépendant des modes… Une vision ironique de société en quoi tout le monde se reconnait.

Hervé Piron s’empare de ce personnage fragile et ridicule qui cherche une issue à sa morosité. Il se prend au jeu des évocations de toutes les personnes qui n’apparaissent pas sur le plateau mais influencent sa vie et son comportement. Il est soutenu par la scénographie évocatrice de Van Heste et Obolensky.

La piscine est plus que suggérée grâce à une projection vidéo aux effets variés accompagnés d’une bande sonore évocatrice. Le travail d’écriture se lit en temps réel sur écran. Les séquences successives bénéficient d’un éclairage particulier qui souligne les ambiances sans nuire à la crédibilité d’un lieu représenté avec justesse, entre réalisme et image mentale. Un travail impeccable pour une soirée de détente pimentée d’une causticité plus que plaisante.

Durée : 1h10
12>30.03.2024 Théâtre de Poche Bruxelles
05.04.2024 Maison de la Culture Tournai
06.04.2024 Maison culturelle Ath

Texte : Fabrice Caro ; adaptation, mise en scène : Denis Laujol ; distribution : Hervé Piron ; dramaturgie : Fanny Esteve ; collaboration artistique : Julien Jaillot ; scénographie : Noémie Vanheste ; création vidéo : Lionel Ravira ; création sonore : Marc Doutrepont ; création lumière : Candice (Tournai/maison de création), La Coop, Shelter Prod ; soutiens : Maison culturelle (Ath [B]), Taxshelter.be, ING, Tax Shelter du Gouvernement fédéral belge ; aides : Ministère de la Culture de la Fédération Wallonie-Bruxelles - Hansel ;
costumes : Solène Valentin ; peinture toile : Eugénie Obolensky ;coproduction : Théâtre de Poche, Cie Ad Hominem, Maison de la Culture (Tournai [B])
Photo (c) Aurore Matignoni

Lire : Fabrice Caro, « Samouraï  », Paris, Gallimard, 2023, 224 p.

A propos de l'auteur
Michel Voiturier
Michel Voiturier

Converti au théâtre à l’âge de 10 ans en découvrant des marionnettes patoisantes. Journaliste chroniqueur culturel (théâtre – expos – livres) au quotidien « Le Courrier de l’Escaut » (1967-2011). Critique sur le site « Rue du Théâtre » (2006-2021)....

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