Paris, Théâtre du Rond-Point, jusqu’au 10 octobre 2010

Dialogue d’un chien avec son maître sur la nécessité de mordre ses amis de Jean-Marie Piemme

Un spectacle qui a du mordant

Dialogue d'un chien avec son maître sur la nécessité de mordre ses amis de Jean-Marie Piemme

Jean-Marie Piemme détourne le principe de la fable qui parle aux hommes de leurs travers sous couvert de personnages animaliers en mettant en scène le dialogue entre un chien et son (futur) maître. Evidemment, le plus censé des deux est notre fidèle ami qui, au fil du spectacle, dompte un individu bourru au caractère de bouledogue qui cache un tempérament de bon bougre derrière ses manières brusques comme l’aura immédiatement perçu notre chien philosophe. Enfin, un philosophe des rues dont le loisir préféré consiste à provoquer des accidents sur l’autoroute en contrebas de laquelle réside le bonhomme, portier de son état dans un grand hôtel, dans une caravane minuscule. Probablement lassé de cette vie aventureuse, le clebs s’est mis en tête de se faire adopter par ce solitaire asocial et désabusé. Quand il montre les dents, c’est seulement pour secouer la torpeur désespérante de Roger le portier.

Piemme ne verse pas dans le simplisme en montrant un animal porteur de bonne parole. Celui-là n’est pas un saint homme de chien, ni un Raminagrobis cynique, c’est un fin limier qui cache bien son jeu et manie assez la rhétorique pour arriver à ses fins personnelles tout en faisant le bonheur de l’autre qui sous ses airs de sauvage n’est pas en reste en matière d’éloquence, toute brutale soit-elle. Les forces en présence ont du répondant et s’offriront quelques péripéties musclées. Au passage, on y entend un message pas du tout bien pensant qui suggérerait que l’altruisme désintéressé pourrait bien être une fausse valeur. Pour se faire adopter, le chien parie sur le retour à la maison de la petite fille dont le père a perdu la garde, au risque de sa vie qu’il ne sauvera que grâce à sa sagacité de chien des rues. Philippe Sireuil présente ainsi le spectacle : « C’est l’histoire d’un con de chien et d’un con de maître. C’est l’histoire d’un papa qui a perdu sa fille et d’un youki qui la lui rapportera. C’est l’histoire d’un homme et de son meilleur ami ». Il a mis en scène cette fable moderne avec une simplicité efficace dans une ambiance de cirque où les duettistes improbables aux chaussures de clown et aux costumes beckettiens font leur numéro. Un spectacle léger et tendre qui a du mordant mené tambour battant par Philippe Jeusette et Fabrice Schillaci.

Dialogue d’un chien avec son maître sur la nécessité de mordre ses amis de Jean-Marie Piemme, mise en scène Philippe Sireuil. Musique : David Callas. Costumes : Catherine Somers. Avec Philippe Jeusette et Fabrice Schillaci. Au théâtre du Rond-point, du mardi au samedi à 18h30. Tel : 0144 95 98 21. Durée : 1h30.
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Texte publié aux éditions Acte-Sud papiers

Crédit photographique : Brigitte Enguérand

A propos de l'auteur
Corinne Denailles
Corinne Denailles

Professeur de lettres ; a travaille dans le secteur de l’édition pédagogique dans le cadre de l’Education nationale. A collaboré comme critique théâtrale à divers journaux (Politis, Passage, Journal du théâtre, Zurban) et revue (Du théâtre,...

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