Aubervilliers-Théâtre de la commune jusqu’au 1er févirer 2009
Jeux doubles de Cristina Comencini
Question de femmes
Qu’est-ce que les filles doivent à leur mère ? Qu’est-ce que les mères transmettent à leur fille ? Comment admettre l’héritage reçu et en même temps construire son autonomie ? Comment se garder d’une relation trop fusionnelle, trop amicale, ou trop hostile, sous-tendue de rivalités féminines ? Ecartelée entre la répétition du scénario maternel et le contre-pied exact, comment trouver la juste place, la bonne distance quand, de surcroît, on est à la fois mère et fille, et femme par-dessus le marché ? Cristina Comencini s’est penchée sur ce sujet vaste et complexe en mettant en scène les mères puis les filles dans un jeu de miroirs fidèles ou déformants selon les cas. Dommage que le discours ait tendance à prendre le pas sur la théâtralité sans vraiment creuser toutes les subtilités du sujet à travers les tempéraments et les relations entre les personnages. La deuxième partie fonctionne comme un calque attendu de ce qui a précédé. Heureusement, Claudia Stavisky a choisi un quatuor féminin de choc, Corinne Jaber, Luce Mouchel, Anita Benito et Marie-Armelle Deguy, qui interprète d’abord des mères des années 1960 avec leurs problèmes d’identité, de couples, et surtout de maternité. Dans la deuxième partie, les pantalons cigarette et les chignons choucroute laissent la place aux blousons de cuir, ou duffle-coat étudiant, aux coupes de cheveux modernes. La féminité conventionnelle a disparu ; le féminisme est passé par là mais les questions de la maternité et du couple sont toujours aussi complexes. Les comédiennes se métamorphosent de mères en filles de manière spectaculaire, l’une contenant l’autre en gestation, clone ou contraire exact. La mère modèle et sa fille, célibataire, obsédée par un désir d’enfant inassouvi ; celle qui est femme avant d’être mère ; la mère trop protectrice qui a étouffé sa fille à force d’en faire le centre de sa vie et qui se suicide, comme l’a fait sa propre mère ; et puis la pianiste qui a renoncé à son art et dont la fille réparera le destin raté en devenant concertiste internationale. Un beau sujet, qui aurait mérité des personnages d’une plus grande densité, servi par quatre comédiennes d’un beau tempérament.
Jeux doubles de Cristina Comencini, mise en scène Claudia Stavisky avec Anita Benito et Marie-Armelle Deguy, Corinne Jaber et Luce Mouchel, au théâtre de la commune à Aubervilliers jusqu’au 1er février 2009, du mardi au samedi à 20h30, jeudi à 19h30, dimanche à 16h. Tél. 01 48 33 16 16. Durée : 1h30.
crédits photo : Christian Ganet