Les yeux noirs de Céline Delbecq

Triple échantillon de violences conjugales

Les yeux noirs de Céline Delbecq

Poursuivant son exploration et sa dénonciation des violences infligées aux femmes, Céline Delbecq propose trois cas de figure de ces faits divers trop courants où les sévices au sein d’un couple sont tortures ordinaires et ravageuses. Un monologue donne le témoignage du vécu d’une femme ; un second donne la parole à un bourreau du quotidien. Un dialogue démonte la stratégie développée par le compagnon pour mettre sa proie sous son influence tyrannique.

Si «  Les yeux noirs  » rejoint la thématique du «  Merveille » de Jeanne Dandoy, il en est le parfait oxymore. Ici la parole n’est pas absente ; au contraire, des mots et rien que des mots. Ici, au contraire, une présentation minimaliste quasi dépouillée d’effets scéniques afin de conserver l’aspect de témoignages vécus. Comme s’il s’agissait de théâtre document.

La première voix résonne dans un lieu clos d’où il est difficile de s’échapper : un phare à l’intérieur duquel les tempêtes semblent plus fréquentes que sur la mer environnante. Les enfants y sont témoins et impuissants. La mère parvient encore à considérer son homme comme double, un être aimant et un autre déchaîné. Le soliloque, c’est un mec qui le partage. Il marche, en pleine nuit, au sortir d’une soirée arrosée. Il marche et ressasse, reproduit la conduite de son propre père. S’en veut mais rien n’y peut.

Le dialogue qui clôture la représentation se compose de six séquences brèves qui constituent une escalade dans le jeu pervers que l’homme joue pour, en manipulateur narcissique, peu à peu, sous la façade d’une fausse compréhension, enfermer sa compagne dans l’étroitesse de l’espace d’un couple où la liberté est remplacée par une soumission à l’emprise de celui qu’on dénomme administrativement « chef de famille ».

Ce n’est sans doute pas la réalisation la plus percutante de la Cie de la Bête noire. Elle a en tout cas le mérite de poser clairement la problématique des violences faites aux femmes et possède toutes les qualités pour alimenter des débats en matinées scolaires comme en bords de scène des soirées tout public.

Durée : 55’
En tournée :
13-14.11.2024 Maison de la Culture Tournai (Be)+
17.01.2025 Centre Culturel Silly(Be)
22>24.04.2025 La Manufacture Nancy

Texte : Céline Delbecq | Mise en scène Jessica Gazon | Interprétation Sébastien Bonnamy, Céline Delbecq | Création sonore Ségolène Neyroud | Lumières et régie générale Aurélie Perret | Costumes Elise Abraham | Régie Aurélie Perret ou David Alonso ; Production : Compagnie de la Bête Noire | Aide : Rideau de Bruxelles, XS Festival/Théâtre National, Centres culturels de Mouscron et de Saint-Ghislain ; Diffusion : La charge du Rhinocéros

Lire : Céline Delbecq, "Les yeux noirs", Carnières, Lansman, 2022, 56 p.(11€)

Compléter:Céline Delbecq, "Cinglée", Carnières, Lansman, 2021, 58p (11€)
http://www.ruedutheatre.eu/article/4223/cinglee/

Comparer : Jeanne Dandoy, "Merveille" :
https://www.webtheatre.fr/Merveille-de-Jeanne-Dandoy?var_mode=calcul
Nicole Sigal, "225 000 femmes kleenex"
https://www.webtheatre.fr/225-000-Femme-kleenex-de-Nicole
Sophie Delacollette, Alice Martinache, Héloïse Meire, "Méduses"
https://www.webtheatre.fr/Meduse-s
Carolina Bianchi, "A Noiva e o Boa Noite Cinderela"
https://webtheatre.fr A Noiva e o Boa Noite Cinderela par Carolina Bianchi au gymnase du Lycée
Rainer Maria Fassbinder, « Liberté à Brême  »
https://webtheatre.fr Liberté à Brême

A propos de l'auteur
Michel Voiturier
Michel Voiturier

Converti au théâtre à l’âge de 10 ans en découvrant des marionnettes patoisantes. Journaliste chroniqueur culturel (théâtre – expos – livres) au quotidien « Le Courrier de l’Escaut » (1967-2011). Critique sur le site « Rue du Théâtre »...

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