Les Frères Kuijken et Robert Kohnen en campagne
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- 27 novembre 2013
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Il faut parfois s’aventurer en France profonde pour pouvoir les entendre et réentendre, les frères pionniers de la résurrection des musiques anciennes, Wieland, Sigiswald, Barthold Kuijken et Robert Kohnen leur claveciniste, inséparables fondateurs de la quasi mythique Petite Bande, ensemble poli aux sons et aux instruments des XVII et XVIIIème siècles.
Ce dimanche de fin novembre, dans l’église Saint Martin d’Amilly, petite commune de l’agglomération de Montargis dans le Loiret – on y accède par l’autoroute de l’Arbre ! – ils étaient réunis pour un concert en forme de match hommage « Allemagne-France ».
Sur le terrain balisé d’amour et de fine connaissance, les deux nations emportaient à part égale les trophées de vainqueur. Du côté d’outre-Rhin, les sonates en trio pour flûte, violon et basse continue de Händel et de Jean Sébastien Bach encadraient la sonate pour violon et viole de gambe de Buxtehude. Les bords du Rhône, après l’entracte offraient les paysages de Couperin (sonate en trio La Pucelle), Leclair (sonate pour flûte et basse continue) et Rameau (cinquième concert de pièce pour clavecin). Bonheur d’entendre le violon dansant de Sigiswald – chef d’orchestre du quatuor réuni pour l’occasion -, les soupirs attentifs de la basse continue de Wieland, les notes perlées de nacre du magicien flûtiste Barthold, et, sur le clavecin tout neuf sorti des ateliers d’Alain Anselme, les doigts précis, subtilement inspirés de Robert Kohnen.
Saint Martin d’Amilly : dans l’église bâtie au XVIème siècle, avec ses belles colonnes soigneusement restaurées et son orgue tout neuf signé du facteur Bertrand Cattiaux, parmi les spectateurs, quelques vétérans écoutaient doublement charmés. Ils avaient découvert La Petite Bande il y a 37 ans à Montargis la voisine. Un appétit pour les musiques de la Renaissance et du baroque s’était ainsi ouvert dans la région. La Petite Bande - ainsi nommée en référence à « la petite bande des violons du roi » de Lully -, fut fondée en 1972 dans la foulée des recherches des musiques d’autrefois jouées sur les instruments de leur temps, recherches initiées notamment par Nicholas Harnoncourt et Gustav Leonhard. De leur jeu fouillé, les quatre K – trois Kuijken, un Kohnen – faisaient découvrir en douceur les cadences de Campra, Grétry, Rameau, Muffat, Vivaldi et de l’incontournable Bach.
Ils furent souvent les hôtes de Montargis. Leurs fans les retrouvent inchangés dans la nef de Saint Martin d’Amilly. Moins de cheveux pour les uns, des crinières blanchies pour d’autres, mais toujours le même charme, la même méticulosité, la même virtuosité de velours. Ils sont annoncés à titre individuel, leur Petite Bande étant momentanément en sommeil à la suite de la suppression de leur subvention en Belgique par le ministère flamand de la culture. Gros émoi dans la sphère des amoureux de musique. Une souscription de soutien a été lancée. Les donateurs auront la primeur d’un livre de Sigiswald : « Reste avec nous, Bach ». On répondra en écho « Reste avec nous, Petite Bande ».