La Ballade de Souchon par Françoise Gillard à la Comédie-Française.

La mélancolie d’un chanteur populaire qui sait émouvoir son public.

La Ballade de Souchon par Françoise Gillard à la Comédie-Française.

A travers quelques bribes d’un joli récit biographique et l’interprétation de chansons évocatrices par des actrices talentueuses de la Comédie-Française, Françoise Gillard met en scène - élégance et pudeur - le si discret poète contemporain Alain Souchon, qui fête en 2023 ses cinquante ans de carrière. Pour la conceptrice de La Ballade de Souchon, ce chanteur populaire au sens noble du terme est une icône à la fois sobre et lumineuse, encline à souligner ce beau sentiment convivial d’être, en même temps que le charme de cette émotion universelle de toute Foule sentimentale.

Les airs des chansons de Souchon, entre mélancolie et jeu amusé, ont traversé les décennies : ses chansons racontent son histoire personnelle et la nôtre aussi, sans brusquer ni provoquer l’auditoire, avec négligence et comme indifférence, pleines d’égard et de sensibilité.

Le spectacle évoque cet anti-héros grâce à une interprétation splendidement ré-appropriée des chansons par les comédiennes - excellentes chanteuses qui, issues de générations diverses, petites-filles, filles et filles matures, s’échangent cette parole. Une distance qui reflète l’artiste dans les esprits - la puissance des premières années, la formation, les épreuves, l’humilité.

Saluons Coraly Zahonero, Françoise Gillard, Danièle Lebrun, Claire de La Rüe du Can et la comédienne de l’académie de la Comédie-Française Yasmine Haller, Emma Laristan, et les musiciens Yannick Deborne, Mathieu Serradell, Florence Hennequin, avec guitares sèches, violoncelle et piano, des instruments qui font partie naturellement du décor d’un salon-cuisine où toutes évoquent l’aura du chanteur. Les musiciens sont aussi les invités d’une soirée décontractée.

L’adaptatrice Amélie Wendling commente : « Alain Souchon a permis à des générations de garçons de s’identifier à un modèle reconnu et aimé, différent du cliché du mâle musclé et sûr de lui, plutôt du côté de l’anti-héros. »

Souchon ne s’est pas conformé aux modes, fidèle et sincère - existence, écriture, interprétation. Et vouloir plaire aux filles, comme un jeu, un défi souriant, une promesse, une raison de tenir debout.
Alain Souchon est né en 1944 à Casablanca. Sa mère Madeleine Lemaître est arrivée au Maroc avec la troupe de Fernand Ledoux, acteur de la Comédie-Française. Alain quitte le Maroc, six mois plus tard, pour la Suisse et la France où sa famille aimante et joyeuse, pétrie des souvenirs de ses années plus fastueuses, vit entre Paris et la Touraine, paradis d’une liberté qui le définit d’emblée. La perte de son père en 1959 nourrit chez l’adolescent une nostalgie qui lui donne envie d’écrire…

Changer de pays, laisser derrière soi les traces d’une enfance perdue, se réfugier dans la poésie, être un élève difficile, aller parfaire son anglais à Londrès, travaillant ici et là, et découvrir la musique et, au sens vital du terme, le rock. Il obtient le succès avec une chanson pour Frédéric François (1973) qu’il interprète lui-même. Il signe son premier album en 1974, avec Laurent Voulzy - arrangeur, compositeur, musicien instrumentiste et chanteur -, avec lequel il forme un duo fidèle. (Florence Thomas, archiviste documentariste à la Comédie-Française)

J’ai dix ans à l’ écriture enfantine innovante est le morceau initiateur de cette amitié. Souchon peut appeler Voulzy au téléphone pour lui dire la chance qu’ils ont eue de se rencontrer, et raccrocher.

A la demande de Truffaut, Souchon écrit L’Amour en fuite (1979), chanson du titre du film qui l’introduit au cinéma : acteur, dans les années1980, puis retourne à la chanson. Il aime marcher sur les routes ou dans le désert, tel Théodore Monod, comme il aime aussi la Loreley d’ Apollinaire : « …Mon amant est parti pour un pays lointain/ Faites-moi donc mourir puisque je n’aime rien… »

Croyant rêver, tant ces airs ont bercé de mélancolie douce les jours de notre existence, on écoute, outre les titres déjà cités : Chanter c’est lancer des balles, Sous les jupes des filles, Dandy, Quand j’serai K.O., La p’tite Bill, elle est malade, Allo Maman Bobo, Le Marin, La vie Théodore, Ultra Moderne Solitude, S’asseoir par terre, Poulailler’s Song, Le monde change de peau.

Un spectacle sur la solitude existentielle, à la manière d’Alain Souchon, plein d’enchantement, de grâce et de délicatesse.

La Ballade de Souchon, adaptation Françoise Gillard et Amélie Wendling, mise en scène Françoise Gillard, Costumes Bernadette Villard, Lumières Éric Dumas, arrangements et direction musicale Yannick Deborne, sonThéo Jonval, travail vocal Mathieu Serradell, 
travail chorégraphique Glysleïn Lefever. Du 26 janvier au 5 mars 2023, 18h30, relâches le lundi et le mardi, au Studio-Théâtre de la Comédie-Française, Galerie du Carrousel du Louvre, 99 rue de Rivoli Paris 1er. www.comedie-francaise.fr
Crédit photo : Brigitte Enguérand, coll. Comédie-Française.

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Véronique Hotte

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