Paris- Théâtre de l’oeuvre

Voltaire’s folies d’après Voltaire

Pamphlétaire et salutaire

Voltaire's folies d'après Voltaire

Le théâtre politique se fait rare sur nos scènes. Cette année, on aura eu la chance d’en voir trois spécimens aussi brillants que différents. Il y a d’abord eu au festival d’Avignon Le Silence des communistes mis en scène par Jean-Pierre Vincent qui a cueilli un public pourtant dur à cuire. Puis en début de saison au théâtre de la colline, dans un tout autre genre, Gênes 01 de l’Italien Paravidino mis en scène par Victor Gautier-Martin proposait un retour sur le terrain du sommet du G8 qui s’est tenu à Gênes en 2001 et qui a connu quelques dégâts collatéraux d’importance. Et voilà maintenant, au théâtre de l’Œuvre la reprise de Voltaire’s folies, spectacle concocté par Jean-François Prévand dans les années 1970 en piochant dans les textes les plus épicés du Voltaire indigné et virulent qui s’étouffait de rage devant la bêtise humaine et l’intolérance de ses concitoyens et trempait sa plume dans le vitriol pour tenter, sans véritable espoir, de réveiller les consciences amorphes. Du pur Voltaire. Dans les années 1980 Gérard Maro avait rencontré un franc succès en programmant le spectacle dans son théâtre de l’époque, la Comédie de Paris. En le reprenant quelque 20 ans plus tard, quoique légèrement lifté, on pourrait craindre que la pièce ait pris de l’âge. Au fond, on le souhaiterait presque devant le constat atterrant que non seulement depuis Voltaire rien n’a changé mais que, depuis 20 ans, les choses ont empiré puisque aujourd’hui on réfléchit à deux fois avant d’aborder un peu lestement certains sujets et que censure insidieuse et autocensure plus ou moins inconsciente sont désormais à l’œuvre, grignotant notre liberté. Les sujets évoqués sont d’une actualité navrante. En mettant en scène les caricatures du catholique, du juif, du protestant et du musulman, Voltaire stigmatise tous les fanatismes confondus ; il tombe à bras raccourcis sur ces préjugés qui ont la vie dure et qui nous font prendre l’étranger pour un sauvage, avec des relents d’esprit colonialiste quand il est noir.
Nous savons que toujours sur le métier, il faut remettre son ouvrage et que la pédagogie c’est la répétition. Puisque donc il faut éternellement enfoncer le clou, autant le faire dans la joie et la bonne humeur. C’est ce dont ne se privent pas les 4 larrons, Charles Ardillon, Olivier Claverie, Gérard Maro et Jean-Jacques Moreau, qui mènent un train d’enfer et semblent s’amuser comme des fous des blagues parfois aussi balourdes que nos esprits sont obtus. Et nous rions avec eux, et de nous. Du théâtre politique version cabaret absolument réjouissant.

Voltaire’s folies d’après Voltaire, adaptation et mise en scène Jean-François Prévand, avec Charles Ardillon, Olivier Claverie, Gérard Maro et Jean-Jacques Moreau. Au théâtre de l’Œuvre. Du mardi au samedi à 21h. Matinée samedi à 17h et dimanche à 15h. durée : 1h30. Tél : 01 44 53 88 88

A propos de l'auteur
Corinne Denailles
Corinne Denailles

Professeur de lettres ; a travaille dans le secteur de l’édition pédagogique dans le cadre de l’Education nationale. A collaboré comme critique théâtrale à divers journaux (Politis, Passage, Journal du théâtre, Zurban) et revue (Du théâtre,...

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