Paris – Théâtre de l’Athénée jusqu’au 9 janvier 2011 et en tournée

Phi-Phi de Henri Christiné et Albert Willemetz

Musiques sucrées et marionnettes à l’antique

Phi-Phi de Henri Christiné et Albert Willemetz

Le rendez-vous annuel des Brigands au Théâtre de l’Athénée vient de prendre son envol avec l’une de ces perles kitch de l’opérette française chères à nos grands et arrières grands parents et qui sont devenues ses marques de fabrique de la compagnie. Après Ta Bouche, Toi, c’est moi et Arsène Lupin (voir webthea des 17 novembre 2007, 8 décembre 2005 et 28 décembre 2008), c’est à nouveau autour de André Willemetz (1887-1964), leur quasi mascotte, que tourne leur dernier spectacle : Phi-Phi ou les aventures rocambolesques de Phidias, sculpteur né en l’an 600 avant JC, s’ébrouant sur les rengaines, valses, musettes et autres fox-trot du compositeur Christiné (1867-1941).

Une « petite chose » de commande destinée à boucher un trou dans la programmation d’un théâtre en panne et qui, à sa création au tout lendemain de la première guerre mondiale apporta le réconfort du rire à un monde en ruines et se transforma en triomphe.

Sans le savoir, sans le vouloir, les co-auteurs de ce phénomène joué plus de 40.000 fois et traduit en une douzaine de langues avaient inventé une forme de divertissement musical qui allait fleurir et s’épanouir sous les auspices des années folles. Dédé, créé trois ans plus tard pour et avec Maurice Chevalier scella leur collaboration de gagneurs auprès du public qui, au sortir des représentations, fredonne leurs airs et les danse.

Chansonnettes et grivoiseries

« Costumes grecs, esprit gaulois, musique française, danses anglaises » : la recette de Phi-Phi se cuisine en direct, à base de chansonnettes – « C’est une gamine charmante » -, de grivoiseries – « Les petits païens… » - et de jeux de mots à faire pâlir de jalousie l’Almanach Vermot, - Venus de Milo au bras arraché, Victoire offerte à Samothrace – plaisanteries de café du commerce auxquelles les pensionnaires des Brigands rajoutent quelques trouvailles de leur cru.

Phidias, faiseur de statues, se tape ses modèles dont l’irrésistible Aspasie, tandis que son épouse joue la fidélité au foyer. Jusqu’au jour où Aspasie se marie avec Périclès tout en restant la maîtresse de Phidias, et où Ardimédon, modèle mâle garanti pur muscle, enseigne à madame Phidias les joies de l’adultère… Façon blague de potache évidemment...

Jeu de miroir, théâtre dans le théâtre

Alors que Christophe Grapperon se retrouve fidèle au poste à la tête de sa petite dizaine de musiciens et qu’il s’amuse comme toujours à insuffler des bulles champagnisées à la musique de Christiné orchestrée par Thibault Perrine, un petit changement de style s’opère dans la mise en scène : au lieu de prendre l’œuvre de face, pour ainsi dire à bras le corps, comme le firent Philippe Labonne ou Stéphane Druet pour les précédents Willemetz, Johanny Bert l’aborde de biais. Ou plutôt en jeu de miroir, de théâtre dans le théâtre en suspendant entre cintres et sol un castelet où des marionnettes manipulées par le chœur des modèles dédoublent le jeu des protagonistes qui arpentent la scène. Marionnettiste de formation, Bert les a fabriquées à l’antique, grises comme la pierre, taillées en muscles et en rondeurs saillantes. Elles ont les têtes et les bras qui se détachent et se promènent, elles miment les textes et s’éclipsent au moment des chansons. Un rien compliquées, elles évoluent dans une sorte de second degré là où le premier, brut de décoffrage, s’impose d’habitude en vigueur de comique troupier. Quelques jolies astuces en allègent le poids, le ballet des lumineux « seins-saints-petits païens » est tout à fait désopilant.

Lara Neumann, savoureuse Aspasie

Moulées dans des collants vert fluo sortis de l’imagination d’Elisabeth de Sauverzac, les modèles chantent, dansent et décapitent les marionnettes. Devenus leurs ombres et doublures, Gilles Bugeaud/monsieur Phidias dit Phi-Phi, Emmanuelle Goizé/Madame Phidas, Olivier Hernandez/Ardimédon, Antoine Sastre/Le Pirée, pensionnaires rodés des Brigands, n’ont heureusement rien perdu de leur charme et de leur rythme, et, nouvelle venue dans la troupe Lara Neumann fait vibrer une savoureuse Aspasie, un timbre de soprano léger taillé pour le répertoire de l’opérette, une présence ronde et radieuse, du bagout et de la séduction… Une découverte.

Phi-Phi, opérette d’Henri Christiné, livret d’Albert Willemetz et Fabien Sollar, compagnie Les Brigands, 9 musiciens dirigés par Christophe Grapperon, chœur de 9 femmes-modèles, mise en scène et en marionnettes Johanny Bert, orchestration Thibault Perrine, scénographie Audrey Vuong, chorégraphie Jean-Marc Hoolbecq, costumes Elisabeth de Sauverzac, lumières Jean-François Breut. Avec Gilles Bugeaud, Emmanuelle Goizé, Christophe Grapperon, Olivier Hernandez, Lara Neumann, Antoine Sastre .

Théâtre de l’Athénée, les 16, 17, 18, 22, 23, 29, 30, 31 décembre, 5, 6, 7, 8 janvier à 20h. Les 19, 26 décembre, 2 & 9 janvier à 20h.

01 53 05 19 19 – www.athenee-theatre.com

En tournée :

15 janvier : Théâtre d’Arras (03 21 71 66 16) –

25 janvier : Cirque-Théâtre d’Elbeuf (02 32 13 10 50) –

30 janvier : Scènes de Jura de Lons-Le-Saunier (03 84 86 03 03) –

5 février : Théâtre de la Colonne à Miramas (04 90 58 37 86) –

10 février : Théâtre Musical de Besançon (03 81 87 81 97)

Crédit photo : Yves Petit

A propos de l'auteur
Caroline Alexander
Caroline Alexander

Née dans des années de tourmente, réussit à échapper au pire, et, sur cette lancée continua à avancer en se faufilant entre les gouttes des orages. Par prudence sa famille la destinait à une carrière dans la confection pour dames. Par cabotinage, elle...

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1 Message

  • Phi-Phi de Henri Christiné et Albert Willemetz 13 septembre 2016 11:27, par Sylvie DERIAUD

    Je suis à la recherche du livret texte de l’opérette de Christiné PHI-PHI. Qui peut m’aider à le trouver. Même des photocopies feront l’affaire. Merci d’avance
    Sylvie Deriaud

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