Le Cirque Pinder Jean Richard

« Le Royaume des animaux »

« Le Royaume des animaux »

Le cirque ! Ensemble de sensations ! Spectacle pour tous les sens ! Allons-y mesdames et messieurs...Oublions de penser...Devant nous c’est du spectacle physique, avec du muscles, de la force dans les bras ! Point n’est besoin d’être cérébral ! Du vécu ! Nous ne sommes pas dans un livre...

Ainsi trouve-t-on encore au cirque le grand plaisir de voir autrui déployer efforts, performances et énergie. Bien calé dans notre siège nous savourons notre rôle de spectateur qui s’offre pour quelques instants une tranche de vie à sensations. Aussi vit-on impunément ces quelques instants en toute procuration. Et pour être encore plus à son plaisir, il y a l’anonymat : au cirque on ne se met pas en toilettes, on endosse une tenue pratique de peur d’avoir froid ou d’être mal assis.
Attention ! Au cirque Pinder ce n’est pas le cas, c’est chaleureux dans tous les sens du terme, c’est même chaleureux dehors sous le froid du soir : le public fusionne, se confond, bavarde, parle sans se connaître. On échange des cigarettes, prête ses gosses pour tenter de choper une frite ou tirer sur une barbe à papa.
Il y a certes une abondance de propositions sous le chapiteau. Les sollicitations fusent dés l’entrée. C’est de bonne guerre. Nullement oppressant. Presque exécuté avec désintéressement. Chacun sait que ces sollicitations sont indispensables à la survie du cirque. Les subventions étant de plus en plus restreintes, le cirque se voit obligé de démultiplier les petits négoces intérieurs. Ce n’est pas nouveau, autrefois, il en était de même au théâtre de foire : On proposait sous le manteau quelques orviétans, élixirs ou flacon précieux.

Les clowns Balders

Mais, ce soir au cirque Pinder, l’ensemble du négoce est cautionné par la bonne cause : la soirée aide une association d’élevage de chiens d’aveugles. Les chiens sont à l’honneur, toute la couronne du premier parterre leur est réservée ainsi qu’à leurs protégés. Les chiens attentifs écoutent et surveillent le va et vient, ils se concertent et semblent se lancer des regards pleins de mutuelle reconnaissance. Ce soir, Ils savent, que peut-être, la responsabilité est double et qu’ils se sentent encore plus considérés.

Les lumières chavirent, virent au bleu par des immenses faisceaux qui balayent et découpent en ombres gigantesques les grands mâts du chapiteau. Une musique, bien reconnue monte du sol et se répand dans cette magique cathédrale de toiles et de lumières.
Les lions et tigres entre en clignant des yeux sous l’effet des projecteurs, ils s’installent très lentement au gré de leur propre silence en faisant comprendre du bout de la queue et par des rictus de babines qu’ils iront là où ils doivent aller quand ils le voudront. Après prise de possession des lieux : passages dans les cerceaux de feux, sauts de tabourets, coquetterie inattendue envers le dompteur etc. Autant d’exercices que l’on connaît déjà mais que l’on attend et regarde à chaque fois avec le même émerveillement. Emerveillement devant ces performances vivantes en direct. Le dompteur Frédéric Edelstein possède une maîtrise tranquille et sympathique, il arbore un sourire délicatement contenu de sérénité qui donne une tension curieuse à la scène.

Frédéric Edelstein et ses fauves

Dans la série des frissons il y a les trapézites et autres femmes et hommes volants. On peut citer le duo acrobalance ou chaque figure demande précision et force physique qui dépassent apparemment le réel des possibilités d’ordre naturel. Les Castilla, funambules à grande hauteur et les Flying Baeta, trapézistes volants ne sont pas moins fournisseurs de frissons. On s’envole, on prend le temps de tourner deux ou trois fois dans les airs, puis on vient s’accrocher comme si c’était par hasard au premier poignet venu, en toute tranquillité.
D’en bas, du fond de notre siège, rien ne paraît laborieux, tout est tellement naturel, glissé, coulé que nous aurions presque la prétention de nous envoler à leurs côtés. Mais on suppose qu’on risquerait de s’essouffler maladroitement derrière l’homme-oiseau qui rebondit trop vite d’un partenaire à l’autre...Alors, on réalise plus modestement qu’il est préférable d’être sur un fauteuil à croquer une pomme d’amour.

Les Castilla

On ressort de ce genre de spectacle accompagné d’un grand sentiment de générosité. Est-ce la condition de vie des gens du cirque qui livre ces êtres généreux à nous offrir leur mise en danger ? Autre sentiment qui prédomine également dans ce type de spectacle : il y règne une confiance mutuelle et réciproque entre les spectateurs et les acteurs. Mais il se dégage aussi de la piste une autre confiance encore plus subtile et plus secrète : celle qui transparaît entre les acteurs et les animaux. Cette confiance intuitive des êtres d’instinct. On pense alors au numéro de dressage des éléphants : dompteur et mastodontes surpassent le stade de l’observation. Les animaux semblent concentrer sur leurs parcours et le dresseur exposé à la redoutable masse en mouvement compte sur la précision et la mémoire des pachydermes.

C’est ainsi que, sans texte, le cirque comme un autre art nous raconte de belles histoires ! A nous aussi de savoir les entendre au-delà des filins, des cages, des cerceaux et des fausses caisses à double trappes.

" Le royaume des animaux", Le Cirque Pinder Jean Richard, pelouse de Reuilly, Paris 12°

 Jusqu’au 14 janvier, après tournée dans toute la France.
 Tel : 01 43 44 09 09

http://www.cirquepinder.com/

© 1998 - 2006 Cirque Pinder

A propos de l'auteur
Jacky Viallon
Jacky Viallon

Jacky Viallon aurait voulu être romancier à la mode, professeur de lettres ( influencé par les petites nouilles en forme de lettres qu’on lui donnait tout petit dans sa soupe et qu’il taquinait avec sa grande cuillère en argent symbole d’une grande...

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