Bruxelles - Théâtre Royal de La Monnaie - jusqu’au 1er mars 2009

LA CALISTO DE Francesco Cavalli

Retour des merveilles et drôleries d’une production légendaire

LA CALISTO DE Francesco Cavalli

La Monnaie de Bruxelles reprend avec bonheur l’une des plus belles productions de La Monnaie : en 1993, il y a 16 ans déjà, le chef d’orchestre René Jacobs faisait redécouvrir le chef d’œuvre oublié d’un successeur de Claudio Monteverdi, Francesco Cavalli (1602-1676) qui, sur les traces de l’inventeur de l’opéra, composa à son tour une ribambelle d’ouvrages où, selon la coutume de l’époque, apparaissaient toutes sortes de citations empruntées à des contemporains.

C’est, entre autres, sur ce principe que René Jacobs eut l’envie de remettre au grand jour le « dramma per musica » que le librettiste Giovanni Faustino emprunta à Ovide : la saga de la chaste nymphe Calisto abusée et séduite par Jupiter, lequel, pour la mettre en confiance se déguise en Diane, la déesse chasseresse à laquelle la nymphe a juré fidélité. Tout se passerait dans le meilleur des leurres possibles, si Junon, l’épouse trahie, ne s’armait des foudres de sa jalousie et transforme la belle ingénue en ourse pataude. Que le tout puissant et repentant Jupiter inscrira dans l’éternité et l’immensité céleste sous la forme de sa plus belle constellation.

Dagmar Piischel fidèle à la mise en scène originale de Herbert Wernicke

Jacobs partagea aussitôt son envie avec le metteur en scène allemand Herbert Wernicke, un grand de la profession, familier des tréteaux de la Monnaie. De leur collaboration naquit ce spectacle ravissant, drôle et coquin que Peter de Caluwe, patron de la maison, a eu la bonne idée de remettre à l’affiche.

En 2002, Wernicke mourait prématurément à l’âge de 56 ans. Dagmar Pischel qui fut son assistante prend la relève avec fidélité et cocasserie. Jacobs et son Concerto Vocale sont à nouveau dans la fosse surélevée comme le veut l’usage pour les ensembles baroques. Les instrumentistes ne sont plus les mêmes mais ils ont les mêmes qualités que leurs aînés d’alors, notamment les aériennes flûtes à bec et ces trombones nouveaux venus en renfort pour tendre les tensions célestes.

Savoureux trucages et subtile machinerie

On retrouve avec émerveillement l’immense boîte qui fait dégringoler des cintres au sol sa peinture sur fond bleu où s’agitent les signes du zodiaque ses hommes volants en poses voluptueuses. Tous les savoureux trucages, toute la subtile machinerie sont à nouveau au rendez-vous, les « ascenseurs-nacelles » cosmiques qui descendent et remontent les dieux de l’Olympe, l’échelle d’or où Mercure se laisse glisser comme sur un toboggan, les trappes qui engloutissent et recrachent les personnages comme autant de boîtes à malice. Sur fond de commedia dell’arte, avec Arlequin, Pierrot, Colombine et autre parodie de Pantalone, les gags fusent en joyeuse dérision avec un penchant appuyé et pas toujours utile pour les grivoiseries où les émois du sexe sont mimés à loisir.

Délicieuse Sophie Karthäuser en Calisto piégée par l’amour

La distribution est elle aussi, forcément, toute neuve et tient toutes les promesses du triomphe d’autrefois, à commencer par la délicieuse Sophie Karthäuser en Calisto piégée par l’amour, toute en charme et en grâce avec en prime un timbre en eau de source vive. Le Jupiter du baryton Johannes Weisser déploie ses graves en dieu adultère et passe avec autant d’aisance aux accents de falsetto quand il se déguise en Diane. La vraie Diane a l’aplomb et l’élégance de la mezzo Caitlin Hulcup tandis que Inga Kalna gratifie les fureurs de Junon d’un vibrato enfiévré. Costumé en Pierrot blanc mélancolique, le contre-ténor Lawrence Zazzo fait merveilleusement entendre les complaintes de l’amoureux transi Endimione. Tous les rôles secondaires sont défendus avec punch et justesse, le Mercure de Georg Nigl, le petit satyre de Max Emanuel Cencic, l’autre contre-ténor de l’ensemble, le Pan burlesque de Magnus Staveland…

La Calisto, dramma per musica de Giovanni Faustino mis en musique par Francesco Cavalli, réalisation musicale et direction de René Jacobs à la tête du Concerto Vocale, mise en scène, décors et costumes de Herbert Wernicke repris par Dagmar Pischel et Stefanie Pasterkamp, lumières Robert Brasseur. Avec Sophie Karthäuser, Johannes Weisser, Georg Nigl, Lawrence Zazzo, Caitlin Hulcup, Thomas Walker, Max Emanuel Cencic, Magnus Staveland, Angélique Noldus, Konstantin Wolff, Inga Kalna.

Bruxelles - Théâtre Royal de la Monnaie, les 17, 19, 20, 24, 26, 27 février à 19h, les 22 février et 1er mars à 15h.

+32 (0) 70 233 939 – www.lamonnaie.be

Crédits photo : Johan Jacobs

A propos de l'auteur
Caroline Alexander
Caroline Alexander

Née dans des années de tourmente, réussit à échapper au pire, et, sur cette lancée continua à avancer en se faufilant entre les gouttes des orages. Par prudence sa famille la destinait à une carrière dans la confection pour dames. Par cabotinage, elle...

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