Paris, Théâtre de l’est parisien jusqu’au 9 avril 2011
Borges vs Goya de Rodrigo Garcia
Coups de poing
Rodrigo Garcia n’est pas toujours celui qui sert le mieux son œuvre. Ses provocations avec ketchup et déshabillages tournent parfois court. On préfère ce que fait Arnaud Troalic, qui s’empare de deux textes, Borges et Goya. Dans le premier, Garcia s’en prend à l’idole de son pays, l’immense Borges, l’écrivain aveugle, qui n’a jamais dénoncé le régime fasciste où il vivait. Dans le second, l’auteur conte une équipée qu’il fit (ou qu’il rêva) à l’assaut des Goya du Prado pour montrer la vraie beauté à ses enfants qui ne rêvaient que d’aller à Disneyland à Mane-la-Vallée. Les textes ne sont pas joués l’un après l’autre, mais imbriqués, lancés dans une même fusion.
La scène est une pelouse où stationne une voiture dévastée et où sont plantés une bibliothèque, un matelas vertical et un canapé. Les acteurs, Julien Flament et Arnaud Troalic, vite en maillot et en short, font monter la tension des mots. Une grande fureur s’empare du plateau. Les interprètes montent au créneau, sur la voiture, au mur de matelas, s’emparent d’un micro pour mieux lancer leurs cris de révolte. Des fragments de textes s’inscrivent sur le décor. Jamais cette violence ne semble gratuite. Elle est dérangeante, bien sûr, pas nécessairement supportable par tout public. Mais ces coups de poing sont du vrai théâtre, plus authentique que tant de dénonciations convenues du monde où nous vivons. Cela cogne avec talent et l’on est ébranlé autant par le talent que par les coups.
Borges vs Goya de Rodrigo Garcia, mise en scène d’Arnaud Troalic, avec Julien Flament et Arnaud Troalic, dramaturgie de Florence Gamblin et Patrick Ama, vidéo de Vincent Bosc, lumière de Philippe Ferbourg, bande-son d’Etienne Cuppens, scénographe en collaboration avec Raphaëlle Latini et Pascale Mandonnet.
Théâtre de l’Est parisien, tél. : 01 43 64 80 80, jusqu’au 9 avril. (Durée : 1h05).
Photo : Olivier Roche