Théâtre de Paris

Amadeus

Éclatante confrontation

Amadeus

Wolfgang Amadeus Mozart, le petit loup aimé de Dieu a caressé les ailes des anges avec sa musique divine. Peter Shaffer projeta l’ombre menaçante de Salieri sur la silhouette poudrée de Mozart. Amadeus fut monté en 1979, avant sa création parisienne en 1982, sous la houlette de Roman Polanski, qui interprétait Mozart face à un François Perrier saisissant en Salieri. La pièce de Shaffer porte un éclairage nouveau sur le compositeur. Mozart se révèle être un sale gosse proférant des gros mots, affectionnant la scatologie, en contradiction complète avec le raffinement de sa musique. Salieri, qui connut gloire et fortune de son vivant, fut tiré des oubliettes de l’histoire par Shaffer qui lui donna le rôle du méchant, lui faisant endosser tous les malheurs de Mozart.

Un génie qui fait peur

Shaffer précise tout de même, en présentant sa pièce : c’est une tragédie avec des allures de reconstitution historique mais c’est une fiction. Il mêle les registres, le personnage central étant bien Salieri qui comprend mieux que quiconque le génie de Mozart. Un génie qui lui fait peur. Il use donc de tout son pouvoir et de sa duplicité pour enrayer la course vers le succès de ce jeune homme insolent dans ses manières comme dans son talent. Stéphane Hillel a astucieusement monté cette tragédie. Le décor d’Édouard Laug présente une superposition de trois volets de travées en plein cintre qui seront, tour à tour, le palais impérial de Joseph II, l’opéra, une taverne ou un hôtel particulier. Le décor en bois souligne l’époque et les costumes fastueux de Stéphane Rolland nous plongent dans le luxe de la cour. Ils mettent aussi en balance l’excentricité de Mozart et la sobriété de Salieri.

Jean Piat est Salieri, dévoré par la jalousie meurtrière

Stéphane Hillel est un directeur d’acteur qui sait faire passer le texte, susciter le déclic des ponctuations et, d’abord, s’entourer d’une belle distribution. Il retrouve ici son compagnon de L’Affrontement et Des Dernières lunes : Jean Piat. Les deux hommes travaillent en parfaite symbiose. Jean Piat est plus qu’un comédien, c’est un monstre sacré populaire, connu même par un public peu familier du théâtre. Sa notoriété est familiale et la rediffusion des Rois maudits a entretenu la légende de ce comédien chez qui les ans n’altèrent en rien son charme, son dynamisme et son talent. Sa côte de sympathie est très importante pour la composition de Salieri. Mozart doit croire en l’appui de cet homme proche du pouvoir. Jean Piat joue en "pizzicati" ce caractère dévoré par l’envie et la jalousie meurtrière. Ame damnée de l’enfer sortie des ténèbres pour mieux nous raconter l’odieux complot fomenté contre son rival, il est comme toujours juste, nuancé, supérieur.

Lorànt Deutsch ou l’insolente inconscience de la jeunesse

Face à lui, Lorànt Deutsch, le sautillant Wolfgang. Après un essai réussi sous la direction de Gildas Bourdet, il confirme ce naturel pétillant qui est son apanage. L’idée est excellente de confronter un monstre sacré des planches et un titi parisien trépidant. Avec sa composition virevoltante, Lorànt Deutsch donne à son personnage l’insolente inconscience de la jeunesse. Ce qui fascine chez lui, c’est ce ton naturel qu’il a, quoi qu’il fasse. On croit à tout. Qu’il joue du piano, qu’il dirige un orchestre, qu’il souffre, il est l’action même. La pièce est d’ores et déjà un succès. La mise en scène élégante de Stéphane Hillel, une distribution où l’on remarquera également la charmante Marie Julie Baup, une Constance bien émouvante, un Gérard Caillaud impérial, mais surtout la confrontation éclatante de Jean Piat et de Lorànt Deutsch, tous les deux touchés par la grâce.

Amadeus, de Peter Shaffer, mise en scène de Stéphane Hillel, avec Jean Piat, Lorànt Deutsch, Marie Julie Baup, Gérard Caillaud, etc. Théâtre de Paris. Tél : 01 48 74 22 57.

A propos de l'auteur
Marie-Laure Atinault
Marie-Laure Atinault

Le début de sa vie fut compliqué ! Son vrai nom est Cosette, et son enfance ne fut pas facile ! Les Thénardier ne lui firent grâce de rien, théâtre, cinéma, musée, château. Un dur apprentissage. Une fois libérée à la majorité, elle se consacra aux...

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3 Messages

  • > Amadeus 3 février 2005 14:23, par trystan

    Sans vouloir donner de leçons :

    Il ne s’agit pas de François Joseph II mais de Joseph II
    On ne dit pas FROMENTER mais FOMENTER.
    Enfin et surtout, Jean Piat est à 1000 coudées au dessus de L Deutsch.

    Trystan

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  • > Amadeus 3 février 2005 15:47, par trystan

    Vous avez enlevé le R à fomenté.

    Si maintenant vous enlevez le E final, complot étant masculin, ce sera parfait, il n’ya aura plus de faute...sur ce mot là !

    Répondre au message

    • > Amadeus 3 février 2005 16:01, par Gilles Dumont

      Merci de vos remarques. Vous avez raison, il est toujours plus agréable de lire un texte sans faute.
      C’est à se demander si le complot n’est pas fomenté par le mot lui-même. En tout cas vous ne le quittez pas des yeux !

      Gilles

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