ZaÏ ZaÏ d’après Fabcaro

• Publié par Michel Voiturier
• 21 janvier 2023
• Critiques
• Théâtre
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Pris en défaut de non allégeance à son supermarché, Nicolas Ancion (auteur véritable dans la vie et héros de pacotille à la scène) prend fuite lançant à sa suite les sbires des parangons de la société de surconsommation dans une poursuite planétaire.

Cette b.d. loufoque, ici adaptée à la scène en parodie de roman-photo, est une caricature délirante d’une société qui régit la citoyenneté à partir de la consommation à commencer par les données identitaires des citoyens soumis à la pub et aux promos, assujettis aux hypermarchés par leur carte de fidélité. On aura compris qu’ici tout est énorme, burlesque, grotesque, dérisoire.

Derrière l’humour débridé, c’est une critique sociétale qui est proposée au public. On y retrouve tous les clichés nés des rumeurs colportées par les réseaux ‘sociaux’ et les médias, les préjugés entretenus par la pensée unique et la paresse intellectuelle, les comportements régis par les peurs irraisonnées, le désir de posséder plutôt que d’exister.

La recette pour faire passer tout cela sans disposer de gros moyens afin de miser sur le spectaculaire plutôt que sur le savoir faire est finalement très simple. Prenez une histoire déjà aussi déjantée que loufoque parue en b.d. et adaptez-la à la région où vous êtes installés. Confectionnez des centaines de photos avec des figurants prêts à être défigurés. Agencez-les en un récit échevelé et projetez-les sur un écran.

Réunissez ensuite un quintet de musiciens-comédiens-bruiteurs assemblés devant des micros et derrière quelques tables alignées avec sono, instruments de musique, gadgets et accessoires divers. Laissez-les jouer durant 1h10 des musiques allègres, concocter des bruits faussement réalistes ou effectivement surréalistes, prendre des voix différentes pour des dialogues parodiques. Ecoutez, regardez, établissez le lien entre les images projetées et les bruitages ou les mots. Riez de bon cœur.

Sans doute vous ne saisirez pas toutes les accumulations des nombreux détails caricaturaux vus et entendus car ils pullulent. Vous en percevrez assez pour vous amuser (même si par moments il y en a tellement que vraiment c’est trop). Surtout, après, réfléchissez, remettez tout cela au cœur de la réalité. Et interrogez-vous si, tous comptes faits, est-il impossible que vous déclenchiez un beau jour un conflit planétaire parce que vous n’avez pas montré votre carte de fidélité du magasin où vous faites vos courses hebdomadaires ?

Dès 14 ans
Durée 1h10

Lire  : Fabcaro, « Zaï Zaï Zaï », Paris, 6 Pieds sous terre, 2016, 101 p.