Paris – Théâtre du Châtelet jusqu’au 25 mars 2012

Orlando paladino de Joseph Haydn

Haydn et l’Arioste en version manga : une joyeuse irrévérence qui laisse la musique intacte

Orlando paladino de Joseph Haydn

Un opéra de Haydn rarement joué, des décors et costumes de bandes dessinées et de mangas japonais : ce mariage qui semblerait à priori contre nature se révèle au Châtelet délicieusement comique. Et en parfaite cohérence musical.

Jean-Luc Choplin, le patron de la maison, aime les rencontres inattendues qui entremêlent les styles et les époques. Avec des bonheurs divers. Si Monteverdi et Haendel revus (et plus saccagés que corrigés) par le plasticien russe Oleg Kulick avaient déclenché des hauts le cœur, cet Orlando paladino mis en ballets loufoques et en scène déjantée par le chorégraphe Kamel Ouali se révèle tout à fait réjouissant.

Orlando paladino, Roland le paladin, tiré du mythique Orlando Furioso de l’Arioste (1474-1533) ne semble pas à priori destiné à faire rire. L’épisode retenu par Haydn est celui où Roland amoureux fou d’Angelica, princesse de Cathay, découvre sur le tronc d’un arbre des cœurs entrelacés portant les noms de l’objet de sa passion et de Medoro. Rodomonto roi de Barbarie est bien décidé a défendre la princesse des ardeurs de ce paladin enflammé. La magicienne Alcina leur prête main forte, tandis que Pasquale l’écuyer d’Orlando s’éprend de la bergère Eurilla et en oublie de servir son maître. Duels, crises de folie, tours de sorcellerie, amnésie... Chez Haydn la tragédie est souriante et se termine bien.

Créé en 1782 au théâtre d’Eszterháza sur une commande du maître des lieux, protecteur mécène du compositeur, le sujet de ce Paladino succède aux Roland de Lully (1685) Orlando Furioso de Vivaldi (1727) et à l’Orlando de Haendel (1733). Mais à la veine tragique de ses prédécesseurs, Haydn a substitué un climat héroïco comique qui entre comme une évidence malicieuse dans les partis pris joués, dansés de Kamel Ouali, les décors jaillis de Star Wars - bestiaire cornu, poissons volants, arbre pipe line, dragon, vaisseau spatial...- et les costumes acidulés de Nicolas Buffe, les acrobaties des Farfadais et les clowneries sur échasses de Louis Fait. Sans oublier les lumières baladeuses de Renaud Corler avec notamment une cocasse course au halo.

La musique est un délice où l’on retrouve la respiration de Mozart qui fut le grand ami de Haydn. Le facétieux Pasquale annonce sans fard le Papageno de La Flûte Enchantée qui allait naître 9 ans plus tard. Jean-Christophe Spinosi à la tête de son Ensemble Matheus ne s’offusque guère de l’intrusion de quelques bêlements poussés par des agneaux valseurs ou d’autres battements de pieds non inscrits dans la partition mais parfaitement en accord avec elle. De Vivaldi, dont il est un spécialiste, à Haydn qu’il semble avoir adopté spontanément, Spinosi respecte l’esprit autant que la chose, et, si des coupures (bienvenues) ont été opérées, l’essentiel y compris les da capo est maintenu.

Sans être éclatante la distribution tient bon la route en voix et en jeu. Le ténor croate Krešimir Špicer campe un Orlando fort en gueule souvent désopilant, Joan Martin-Royo, baryton espagnol lui oppose la résistance du redresseur de torts Rodomonte, Ekaterina Bakanova, soprano russe en Angelica et le canadien Pascal Charbonneau ténor juvénile pour Medoro forment un couple tout mignon, Alcina la fée magicienne a l’autorité évanescente de la mezzo russe Anna Goryachova, la portugaise Raquel Camarinha porte à ravir les cuissardes vert pomme d’Eurilla, Bruno Taddia, baryton né à Pavie en Italie compose un Pasquale à la fois naïf et hilarant.

Les images, les gags se suivent se suivent, se bousculent sans prendre le temps de faire ouf. C’est presque trop. A force de tout regarder on en oublie parfois d’écouter...

Cette mini réserve faite on ne peut que se joindre à l’ovation debout qui clôturait la première représentation de ce Haydn rajeuni, témoin du plaisir qui avait immergé la salle du parterre au poulailler.

Orlando paladino de Joseph Haydn, livret de Nunziato Porta d’après Orlando Furioso de l’Arioste. Ensemble Matheus direction Jean-Christophe Spinosi, mise en scène et chorégraphie Kamel Ouali, décors, costumes et conception Visuelle Nicolas Buffe, lumières Renaud Corler. Avec Krešimir Špicer, Ekaterina Bakanova, Pascal Charbonneau, Anna Goryachova, Joan Martin-Royo, Raquel Camarhina, Bruno Taddia, Adam Palka, David Curry .

Théâtre du Châtelet, les 17, 19, 21, 23 mars à 20h, le 25 à 15h

01 40 28 28 40 – www.chatelet-theatre.com

A propos de l'auteur
Caroline Alexander
Caroline Alexander

Née dans des années de tourmente, réussit à échapper au pire, et, sur cette lancée continua à avancer en se faufilant entre les gouttes des orages. Par prudence sa famille la destinait à une carrière dans la confection pour dames. Par cabotinage, elle...

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1 Message

  • Orlando paladino de Joseph Haydn 15 avril 2012 18:29, par Claude Pluyaud

    representation impossible,loufoque ,rendant incomprehensile l’action la rendant ennuyeuse.Cela n’engage que moi un tres mauvais spectacle ;la mise en scene en venant à parasiter le spectacle

    Répondre au message

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