Così fan tutti d’après Mozart au Théâtre de l’Athénée jusqu’au 9 février
Mozart défait et refait
Spectacle attrayant et quelque peu iconoclaste que ce Così de Mozart revisité.
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- 1er février
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LE THÉÂTRE DE L’ATHÉNÉE s’est fait une spécialité de spectacles lyriques sortant de l’ordinaire, en général de format de chambre en adéquation avec sa salle de dimension réduite. Ainsi en est-il de Così fan tutti (« comme ils font tous »), relecture de Così fan tutte (« comme elles font toutes »), le chef-d’œuvre de Mozart. L’adaptation revient à Antonio Cuenca Ruiz, qui assure aussi la mise en scène, sur une musique réécrite par Maël Bailly. De la musique du génial Salzbourgeois restent des airs et quelques récitatifs, les uns et les autres écourtés, parsemés de récitatifs improvisés et dialogues parlés, sur un petit ensemble instrumental. Celui-ci est constitué dans la fosse par l’ensemble Miroirs Étendus, violon, violoncelle, flûte, clarinette (comme dans la partition originale), mais aussi guitare électrique, ondes Martenot, saxophone et piano. En résulte une sonorité instrumentale quelque peu grinçante, mais qui laisse le chant s’épancher sans le couvrir.
La trame est elle aussi écourtée et même en partie détournée, qui replace les personnages, ceux bien puisés à l’opéra, dans un contexte de libertinage actuel. C’est ce que présente la mise en scène de Cuenca Ruiz, qui fait fi du déguisement des deux amoureux masculins, pour convertir en libre-arbitre la réaction des deux amoureuses féminines. Une relecture actuelle en quelque sorte, avec ses accents féministes. On retrouve donc les personnages du dramma giocoso sur un plateau nu, dans des vêtures actuelles (bien sûr !) devant quelques images projetées sur grand écran (comme souvent dans les mises en scène actuelles). Mais l’action, ardemment menée, vise au plus juste dans un jeu théâtral sans équivoque.
Sonorités diverses
Les six chanteurs réunis n’en sont pas moins d’excellente facture, dans leur jeu comédien comme surtout dans leur interprétation vocale. Citons-les tous, puisque tous le méritent : Margaux Poguet (Fiordiligi), Mathilde Ortscheidt (Dorabella), Marie Soubestre (Despina), Sahy Ratia (Ferrando, d’une belle délicatesse dans son « Un’aura amorosa »), Romain Dayez (Guglielmo), Ronan Nédélec (Don Alfonso). Et les airs sublimes de Mozart (pour ceux qui restent), souvent a cappella, conservent leurs beaux attraits.
On serait plus réservé pour la sonorité de l’ensemble instrumental, confinant au bruit intempestif ou au grincement, sans réelle portée suave ou diaphane. D’autant que s’ajoutent des interventions parlées ou criées de ces mêmes instrumentistes convertis en chœur approximatif, qui parsèment sans réel impact (sans compter les gloussements et rires intempestifs façon théâtre de boulevard d’une partie du public). La direction musicale de Fiona Monbet, n’en est pas moins efficace, sachant clairement distribuer les sonorités et les interventions de la fosse au plateau vocal. Au final, deux heures (en lieu des trois de l’opéra original) d’une soirée en forme de « pourquoi pas ? » mais plutôt distrayante et fort bien agencée.
Illustration : photo Pascale Cholette (dr)
Mozart, musique adaptée par Maël Bailly : Così fan tutti. Margaux Poguet (Fiordiligi), Mathilde Ortscheidt (Dorabella), Marie Soubestre (Despina), Sahy Ratia (Ferrando), Romain Dayez (Guglielmo), Ronan Nédélec (Don Alfonso). Antonio Ruiz Cuenca (adaptation du livret et mise en scène). Orchestre Miroirs Étendus, dir. Fiona Monbet. Paris, Théâtre de l’Athénée, 30 janvier 2025.