Théâtre des Champs-Elysées (Paris)

Le Nozze di Figaro

Clairs-obscurs d’un musée imaginaire

Le Nozze di Figaro

Devançant de quelques encablures les commémorations et festivités de la prochaine « année Mozart » pour le 250e anniversaire de sa naissance, le Théâtre des Champs-Elysées à Paris vient de lancer le navire de sa saison entièrement dédiée au cher Wolfgang Amadeus et qui ne comportera pas moins de quatre vingt événements, concerts, récitals et opéras.

Le « la » de la série vient d’être donné avec Le Nozze di Figaro, la production signée Jean-Louis Martinoty et le Concerto Köln, reprise pour la troisième fois dans ce même théâtre, si belle et si juste qu’elle est en passe de devenir un classique de référence au même titre que la mise en scène de Giorgio Strehler qui tint l’affiche de l’Opéra de Paris durant trente saisons.
Martinoty fait évoluer La Folle Journée de Beaumarchais, mise en livret par Da Ponte et en musique par Mozart dans un lieu improbable, une sorte de musée imaginaire ou de grenier de palais princier où seraient entreposées quelques belles toiles de l’histoire de la peinture, avec des bouquets, des natures mortes aux allures de Breughel ou de Bosch, les jambes d’un Christ Renaissance, des paysages à la Watteau, des clairs-obscurs piqués à De La Tour ou à Rembrandt...

Ludique et raffiné

Le sol en pente légère est une palette barbouillée de bleus, d’ocre et de vermillons... Les tableaux grimpent dans les cintres, en retombent à l’endroit, à l’envers, découvrent quelques meubles ou accessoires, une panière d’osier, un matelas, une coiffeuse et délimitent les espaces de jeux et d’action. C’est à la fois ludique et raffiné, et surtout, cela donne à l’imagination un délicieux permis de batifoler.
Les musiciens du Concerto Köln sont toujours dans la fosse avec leurs instruments d’époque mais sont cette fois dirigés par Evelino Pido qui succède à René Jacobs. S’il n’a pas le moelleux, le poli, l’allant du grand spécialiste baroque qu’est le Flamand, l’Italien a du mordant et il emballe les quatre actes prestissimo, sans s’embarrasser d’états d’âmes.

Un son qui s’envole en clarté et plénitude

Les travaux entrepris l’été dernier pour améliorer l’acoustique de la salle ont porté leurs fruits : le son, autrefois assourdi par les tapis et moquette, s’envole désormais en clarté et plénitude.
Si l’on excepte le Figaro d’Andrea Concetti, au jeu sans relief et à la voix tout aussi plate, tous les autres chanteurs mettent Mozart en fête. De la première distribution ne reste que Patrizia Ciofi, Suzanne au jeu mutin et au timbre dont le charme et la grâce se substitue à l’ampleur. Une constatation qui vaut également pour Veronica Cangemi, comtesse juvénile au legato tout en nuances et subtilités. En Almaviva, le baryton suisse Rudolf Rosen fait figure de révélation. Elégance, fermeté, humour et graves satinés en font un comte idéal. Cherubino, l’enfant chéri de ces dames, a également fait battre les cœurs des spectateurs : Anna Bonitatibus, minois espiègle et voix en sucre d’orge, est tout simplement adorable.

Le Nozze di Figaro de Mozart et Da Ponte, orchestre du Concerto Köln et chœur du Théâtre des Champs Elysées, direction Evelino Pido, mise en scène Jean Louis Martinoty, décors Hans Schavernoch, costumes Sylvie de Segonzac, lumières Jean Kalman. Avec Rudolf Rosen, Veronica Cangemi, Patrizia Ciofi, Andrea Concetti, Anna Bonitatibus, Sophie Pondjiclis, Angelo Romero, Antonio Abete, Peter Hoare, Pauline Courtin, Christian Jean. Théâtre des Champs-Elysées à Paris, les 12,14,18,20,22 octobre à 19h30, le 16 à 17h - 01 49 52 50 50.

Photo : Alvaro Yanez

A propos de l'auteur
Caroline Alexander
Caroline Alexander

Née dans des années de tourmente, réussit à échapper au pire, et, sur cette lancée continua à avancer en se faufilant entre les gouttes des orages. Par prudence sa famille la destinait à une carrière dans la confection pour dames. Par cabotinage, elle...

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