Critique – Opéra-Classique

Benvenuto Cellini d’Hector Berlioz

Opéra spectaculaire - mise en scène grandiose

Benvenuto Cellini d'Hector Berlioz

La création de Benvenuto Cellini d’Hector Berlioz eut lieu à Paris dans la salle Le Pelletier en 1838. Sans aucun succès. L’opéra n’arriva à Barcelone qu’en 1977 –avec Alain Vanzo, Andrée Esposito et le très jeune Joan Pons- et seulement pour une petite série de trois représentations ! Il n’a pas été redonné depuis. On imagine alors l’intérêt de cette reprise et ce jeudi 12 novembre, la salle était totalement occupée par un public intéressé et même à priori enthousiaste. Il n’a pas été déçu.

L’opéra raconte de manière fantaisiste la création de la célèbre statue de Persée par Benvenuto Cellini. En parallèle se déroule l’histoire sentimentale du sculpteur avec Teresa, la fille de Giacomo Balducci, trésorier du Pape. Giacomo Balducci, farouchement décidé à contrer les plans professionnels et amoureux de Benvenuto Cellini, devra céder sur toute la ligne à la fin de la pièce.
Précisons que la célèbre statue se trouve depuis toujours sur la « piazza della Signoria » à Florence, car, en réalité, elle fut commandée par Cosimo I de Toscane, afin de fêter la victoire des Médicis sur les républicains de Florence, et non par Clément VII. De même la statue fut réalisée à Florence entre 1545 et 1554, et non à Rome en 1532 comme dit le livret de l’opéra. Elle n’a jamais quitté la capitale de la Toscane.

Une mise en scène complexe mais lisible dans un décor fouillé de grand effet.

De la part de Terry Gilliam dont le travail avec les Monthy Pyton est très connu du public espagnol, on pouvait s’attendre au pire. Il n’en a rien été. Le metteur en scène a traité la pièce avec un grand respect sans chercher à transformer une nouvelle fois l’histoire du sculpteur italien racontée plus que librement par les librettistes. Un résultat donc très lisible, même si, ici ou là –la figure du pape, le Carnaval romain transformé en cirque avec ses funambules et autres saltimbanques,…- a fait ressortir la personnalité tarabiscotée du fécond metteur en scène. Le metteur en scène n’a pas hésité à positionner ses chanteurs soit au fond de la scène, soit en hauteur, augmentant ainsi les difficultés pour les artistes. Ils s’en sont très bien sortis. N’oublions pas le magnifique travail d’Aaron Marsden, auteur du décor complexe comprenant plusieurs changements à vue –surtout pendant le premier acte-, accompagnés par l’éclairage de Paule Constable constamment équilibré en fonction de la partie de la scène utilisée par Terry Gillian.

Le chœur, omniprésent, les rôles secondaires très bien tenus.

Le chœur du Liceu a joué un personnage très important de l’histoire : le peuple romain. Aux ordres de Conxita Garcia, sa nouvelle directrice, il a interprété l’énorme partition sans aucun complexe. Il a chanté avec une grande justesse vocale mais aussi avec assurance et tranquillité ii a exécuté des mouvements d’ensemble nécessaires, évitant ainsi le risque de transformer l’opéra en oratorio.
Chacun des personnages secondaires de Francisco Vas –Francesco- à Antoni Comas –l’hôtelier- en passant par Ascanio –Annalisa Stroppa- ou Maurizio Muraro –Balducci- a apporté à l’histoire sa contribution positive, et même très positive dans le cas des deux premiers artistes qui n’ont pas hésité ici ou là à unir leur voix et les gestes à celles et ceux du chœur pour renforcer certains effets d’ensemble.

Une distribution de bon aloi

Le ténor Adrian Xhema –Benvenuto- doté d’un beau timbre et d’un excellent phrasé dans les registres moyen et grave s’est montré un peu fâché avec le registre aigu qu’il a souvent chanté, certes avec puissance, mais avec une certaine perte de timbre et de justesse. A ses côtés la soprano Kathryn Lewek aura été une Teresa impeccable, tant sa diction a été claire, son timbre agréable, son émission régulière et son interprétation dramatique bien caractérisée. Ashley Holland a été, lui aussi sans défaut dans le rôle de l’antipathique Fieramosca, sculpteur capable des pires atrocités dans le but d’empêcher la victoire de son rival Cellini. Mention particulière pour le travail du vétéran Eric Halfvarson –Clément VII-, vocalement sans faute, que le metteur en scène a transformé en une sorte de Timur, empereur de Chine et père de la princesse Turandot, sans que l’on puisse donner ici la raison de cette option qui est venue troubler gratuitement la lisibilité générale de la production.

L’orchestre, élément discordant

C’est finalement l’orchestre, dirigé par Josep Pons, son Directeur attitré, qui aura été le point faible de la soirée. Il a certes joué juste et il a été présent pendant les moments forts de l’action et de la partition mais, sans doute par manque d’habitude, il n’a pas su traduire comme il se devait la subtilité, le lyrisme de la musique d’Hector Berlioz qu’il a livré, pesante et sans nuances avec une « kolossal finesse » par moments.

Benvenuto Cellini, opéra en deux actes d’Hector Berlioz, livret de Lèon de Wailly et Auguste Barbier. Direction musicale Josep Pons. Mise en scène et décors Terry Gilliam, costumes Katrina Lindsay, lumières Paul Constable. Avec Adrian Xhema (le 12 novembre, John Osborn les autres dates), Maurizio Muraro, Ashley Holland, Eric Halfvarson, Francisco Vas, Valeriano Lanchas, Manel Esteve Madrid, Antoni Comas, Kathryn Lewen, Annalisa Stroppa .

Coproduction English National Opera, Dutch National Opera & Ballet, Teatro dell’Opera di Roma.

Gran Teatre del Liceu les 8, 10, 12, 14, 16 et 19 novembre.

Tél. +34 93 485 99 29 Fax +34 93 485 99 18
http://www.liceubarcelona.com exploitation@liceubarcelona.cat

Photos Antoni Bofill

A propos de l'auteur
Jaime Estapà i Argemí
Jaime Estapà i Argemí

Je suis venu en France en 1966 diplômé de l’Ecole d’Ingénieurs Industriels de Barcelone pour travailler à la recherche opérationnelle au CERA (Centre d’études et recherches en automatismes) à Villacoublay puis chez Thomson Automatismes à Chatou. En même...

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